Conseil National

Conseil National du 6 mai 2023: interventions de Jean Marc Durand – Denis Durand – Frédéric Boccara – Evelyne Ternant – Patricia Tejas – Amar Bellal

Nous sortons du 39èeme congrès qui a été un congrès de qualité à beaucoup d’égards. Il s’agit maintenant de passer à la mise en œuvre, à l’application concrète de nos orientations dans la vie du parti au quotidien.

Intervention de Jean Marc Durand

port

Nous sortons du 39èeme congrès qui a été un congrès de qualité à beaucoup d’égards.

Il en ressort des orientations et des engagements importants et précis qui ont conforté les choix du 38ème.

Il s’agit maintenant de passer à la mise en œuvre, à l’application concrète de nos orientations dans la vie du parti au quotidien. Le parti en a absolument besoin. D’une part pour se donner une vraie perspective de renforcement, ce qui revêt d’une certaine manière un caractère vital car il s’agit de rajeunir et de revivifier partout nos instances et notre fonctionnement. C’est une des conditions pour être à la hauteur des combats politiques à mener aujourd’hui et dans la période à venir.

C’est d’autre part le chemin à suivre et le but à poursuivre si nous voulons proposer, de façon crédible une alternative de changement mobilisatrice à notre peuple ce qui va de pair avec l’enjeu qui réside dans notre capacité à déjouer les plans d’accession au pouvoir que ne cache d’ailleurs plus le Rassemblement national.

Sur toutes ces questions nous sommes attendus par les communistes mais aussi par les salariés et les citoyens, particulièrement par tous ceux et toutes celles qui sont en lutte contre la réforme Macron des retraites. Une lutte marquée par 13 temps forts et qui dure depuis 3 mois et qui a oh combien besoin d’un débouché politique à la hauteur. Sinon gare à la chute ! Et le débouché politique ce ne sont pas seulement ou simplement les échéances électorales ni même que les batailles dans les institutions.

Il y a un enjeu colossal à travailler concrètement avec le peuple, au sein de la gauche dans le débat et avec des initiatives, des issues politiques claires, s’attaquant à la racine des problèmes à partir de propositions fondatrices d’un vrai projet alternatif et ferment du rassemblement. A la place d’accords de sommet à connotation très souvent très politicienne qui ne valent que le temps d’une élection, il y a besoin d’avancer à tous les niveaux dans le débat et l’action par la construction d’un rapport de force sur des contenus qui permette sûrement et durablement de dépasser l’écueil de la droite et de l’extrême-droite.

Dans cet esprit, oui alors les échéances électorales ont un rôle à tenir en tant que moment fort d’expression et de confrontation des points de vue, des projets. Les prochaines élections européennes peuvent être un de ces temps. A ce propos ce que je lis dans la presse ces derniers temps m’interroge. Je ne voudrais pas que nous nous retrouvions coincés dans de grandes manœuvres : liste unique aux européennes, candidat unique de la gauche en 2027. On aurait fait deux congrès pour rien ?

Il y a besoin comme jamais de l’affirmation de l’originalité des idées communistes, à commencer par ce que nous portons sur l’Europe ! D’où le besoin d’une liste du PCF conduite par un communiste. Une liste communiste aux européennes c’est en plus un choix qu’on peut difficilement déconnecter d’un autre qui est celui d’un.e candidat.e communiste à la prochaine présidentielle. Attention en effet à ne pas lâcher la proie pour l’ombre ! Donc des Européennes dont on doit par ailleurs lancer la campagne tout de suite, notamment sur les enjeux énormes autour de la question de l’utilisation de l’argent, du rôle des banques, particulièrement de la BCE et de sa politique du crédit. Cela, au moment ses choix où comme ceux la FED, font s’amonceler de lourds nuages sur l’ensemble du secteur bancaire, sur la finance et sur l’économie mondiale, avec le danger d’un enfoncement des pays dans une crise budgétaire et sociale qu’on imagine à peine.

Oui jamais il n’a été aussi nécessaire de parler et de proposer une sélectivité nouvelle du crédit, d’avancer la nécessité d’une nouvelle harmonisation fiscale en Europe pour financer des investissements utiles au développement humain et à la lutte climatique, notamment par un soutien massif aux services publics et à leur extension comme à des emplois pour de nouvelles productions, en France comme en Europe.

_

Intervention de Denis Durand

Le 1er mai a été un succès pour les syndicats malgré tout ce qui a été orchestré pour détourner le mouvement de ses objectifs. Si le mouvement est si durable et si ancré dans un soutien de la population, ce n’est pas seulement parce que « personne n’a envie de travailler deux ans de plus », comme l’a dit Macron. C’est l’aspiration profonde à une nouvelle conception de tous les âges de la vie. La revendication qui est dans les slogans, dans les têtes, dans les cœurs, c’est la retraite à 60 ans pour toutes et tous, avec prise en compte des années d’études dans la durée de cotisation donnant droit à la retraite à taux plein. Revendication qui ne figure pas dans le programme de la NUPES mais que nous partageons avec la CGT. Ce n’est pas parce que toutes les forces politiques, sauf le PCF, font tout pour passer à autre chose que nous devons l’abandonner. Au contraire, ce qui peut permettre au mouvement de se prolonger jusqu’à une victoire contre la régression sociale incarnée aujourd’hui par la politique d’Emmanuel Macron, c’est la présence d’un nouveau projet de civilisation où l’accès à une formation choisie, tout au long de la vie, ouvre à chacune et à chacun la possibilité de développer librement toutes ses capacités, dans une sécurité d’emploi et de revenu.

Mais cela demande beaucoup d’argent ! Non pas un simple « partage des richesses » mais une prise de pouvoir démocratique sur l’utilisation de l’argent, pour que la production vise une nouvelle efficacité, fondée sur le développement de toutes les capacités humaines.

C’est ce qui inspire nos propositions concrètes, comme la modulation à la hausse des cotisations sociales pour les entreprises qui ne développent pas l’emploi ou le détruisent. Il s’agit de peser, en appui aux luttes sociales, pour résorber la financiarisation de l’économie et développer à la place l’emploi, les salaires, et donc la base du financement sain des retraites et de la Sécurité sociale. Ainsi, le financement du programme présidentiel de Fabien Roussel est fondé sur l’accès à un vrai emploi efficace de toutes celles et de tous ceux qui en sont privés aujourd’hui, et sur un accès massif de toutes et tous la formation. De cette façon, les richesses créées augmentent à mesure de la transformation écologique des productions, la part des salaires au sein de ces richesses augmente, et ce qui augmente le plus, ce sont les cotisations sociales. L’appel « Pour une réforme de progrès social et de civilisation, contre le recul de l’âge de départ » (https://framaforms.org/retraites-une-autre-reforme-1674048256), lancé par de nombreuses personnalités, y compris tout ce qui compte dans le mouvement syndical, de la CGT à la CGC, témoigne de l’écho de ces propositions, aussitôt que nous les soumettons au débat.

Ce qui se profile derrière le mouvement pour les retraites, c’est donc la possibilité d’une mise en cause de la rentabilité financière comme régulateur de l’économie. Bref, la possibilité concrète d’un chemin vers le dépassement du capitalisme.

C’est, dans la vie, le projet communiste que nous avons adopté à Marseille.

Ce projet est extrêmement puissant pour combattre les nouvelles dispositions que le pouvoir met en place au nom du « travail » ou du « plein emploi ».

Il est extrêmement puissant pour combattre le Rassemblement national et ses impostures, la promesse d’une retraite à 60 ans mais uniquement, dit son programme, pour les personnes « entrées dans le monde du travail tôt, entre 17 et 20 ans », tout cela en ruinant la Sécurité sociale par de nouvelles exonérations de cotisations patronales.

Et il est donc extrêmement puissant pour aider la gauche à se rassembler en proposant enfin aux couches populaires et aux couches moyennes les grands axes d’une alternative crédible.

La cohérence du projet communiste peut, de la même façon, aider à appréhender le basculement du monde qui semble être en train de se produire, et qui peut déboucher vers un fractionnement dévastateur pour l’Europe et pour la France ou, au contraire, vers une nouvelle perspective européenne travaillant à affirmer les rapports de forces nécessaires à la construction d’un monde de paix et de coopération.

Je pense que cette cohérence est ce qui nous permettra de mener de front les batailles des prochains mois : celle des retraites, celle de l’emploi face à la nouvelle offensive de Macron, celle des salaires face à l’inflation, celle du climat et de la biodiversité, celle de la paix, celle du débat à gauche sur les conditions de réussite d’une alternative à Macron et à la menace fasciste, à la faveur de la campagne pour les élections européennes, une occasion que nous ne pouvons pas nous permettre de manquer pour mettre notre projet de société à la disposition de nos concitoyens.

Intervention de Frédéric Boccara

Première intervention

  1. Le mouvement

Il faut souligner la force du mouvement et l’importance que prend le syndicalisme dans celui-ci. C’est très important pour la suite. Dans le même temps, je partage toutes les remarques d’Evelyne (Ternant) sur les limites du mouvement, et donc sur l’exigence de notre intervention, de même que les réflexions très politiques de Denis (Durand) sur l’enjeu renforcé d’une retraite à 60 ans, avec une conception renouvelée, et non pas d’un simple statu quo à 62 ans (et plus, en réalité, puisque la réforme Touraine resterait en vigueur dans le cas d’un simple retrait de la réforme Macron-Borne).

Je veux ajouter deux points très important

  • Si E. Macron ne lâche pas, c’est loin d’être purement une question de personnalité et de psychologie. C’est aussi, surtout, qu’il est en réalité le mandataire direct du grand capital, lui-même ex-banquier associé de la Banque Rothschild. Il y a donc une explication politique.
  • Ce qui explique cette détermination du grand capital, c’est qu’il est aux abois, dans une crise profonde, dont il veut masquer la gravité y compris pour lui-même. Il a besoin à tout prix de plus de profit : sa suraccumulation, son gonflement énorme (+60% durant la pandémie) pèse sur son taux de profit si sa masse de profit n’augmente pas à due proportion ! Composante de ces exigences du capital, la hausse des taux exige un prélèvement supplémentaire de 30 milliards d’euros sur le budget de l’Etat, au bénéfice des marchés financiers. D’où le besoin de dégager des milliards sur les dépenses sociales (retraite, chômage, …). Et déjà les experts du patronat (Rexecode) expliquent que tout cela ne suffira pas, qu’il faudra une autre contre-réforme.

Il faut que nous donnions ces explications, aussi bien dans nos passages médiatiques que dans nos débats avec « les gens », nos interventions militantes dans le mouvement.

  1. Perspectives.

La question de la perspective politique est fondamentale, mais il ne faut surtout pas la séparer de la perspective de fond : le fond de la réforme des retraites et le fond d’un programme de gauche, plus général, à la hauteur des nécessités objectives de la situation et des attentes. Un programme qui se doit d’être rassembleur mais, en réalité, ne peut éviter d’enclencher des transformation révolutionnaires.

J’alerte : Il faut une construction politique, mais nous ne pouvons pas recommencer une nième construction politique de sommet sans monter les exigences de fond et le débat permanent sur : comment faire avancer des exigences sans attendre un grand soir électoral.

Le mouvement ― et ses exigences ― peut constituer une pédagogie par la pratique :

  • Enjeu politique décisif des entreprises, de changer leur comportement et leur gestion, puisque le nœud sur les retraites, c’est l’emploi, les salaires et s’attaquer à la finance.
  • Enjeu de l’utilisation de l’argent
  • Une perspective politique sur l’emploi, telle que la SEF (sécurité d’emploi ou de formation) peut la donner, articulant autre travail, sécurité de vie, développement de soi aussi bien par la formation, que par des mobilités voulues que par un développement du hors du travail (y compris la retraite)
  • Plus génénéralement, le besoin de transformations fondamentales, tout particulièrement : (1) des nationalisations d’un nouveau type (banques et grandes entreprises industrielles ou de services) donnant des pouvoirs d’intervention sur la gestion pour mettre en œuvre d’autres critères de gestion et d’efficacité que ceux du capital (2) des institutions nouvelles, d’intervention sur les entreprises et les banques et planification économique, écologique et sociale.

Ainsi, il faut aller bien au-delà du 49.3 : une démocratie parlementaire type 4ème République ne permettrait pas de résoudre les problèmes, il faut un saut qualitatif (en réalité, révolutionnaire) pour des institutions ouvrant des pouvoirs sur l’utilisation de l’argent des entreprises et pour intervenir sur leur gestion. Ce sont les exigences de vie et d’écologie qui l’imposent.

D’ailleurs, au fond la 5ème République et son hyper-présidentialisme, constitue un verrou pour masquer la responsabilité et le pouvoir des grandes multinationales et du capital.

Doc, nous ne voulons pas tourner la page, mais nous ne voulons pas nous enfermer dans les retraites : élargir jusqu’à l’emploi, les salaires, changer la production, mais aussi l’inflation et le pouvoir d’achat, jusqu’à changer le comportement des entreprises et viser une tout autre conception de l’emploi et de la vie économique et sociale.

C’est relever le défi d’E. Macron et s’oppose profondément à ses projets

  • un plein-emploi, où il parle travail sans parler création d’emploi, et les oppose donc (comme l’a dit Véronique (Mahé) dans son rapport en reprenant ma formulation) jusqu’à la conditionnalisation du RSA à faire n’importe quel travail !
  • pouvoir d’achat en parlant « partage des profits », pour intégrer les travailleurs.ses à la rentabilité, objectif du capital, et à la baisse des cotisations sociales. Tout cela au lieu augmenter franchement les salaires bruts !
  • prétendre câliner les couches moyennes, en renforçant l’austérité pour les services publics.
  1. La Votation citoyenne.

Je suis pour, et le partage la proposition faite dans le rapport.

Mais cela va nécessiter une bataille d’idées acharnée… sur l’alternative. Pour montrer qu’une retraite à 60 ans, c’est possible.

Pour cela, il nous faut faire un effort de clarté dans la façon de présenter nos propositions. Denis en a déjà dit un mot sur les objectifs (prise en compte des années d’étude + ambition à la hauteur de 100 Md€). Il faut aussi être clair sur le financement. Nous avons 2 leviers principaux de financement. Le premier, est généralement bien présenté : nouvelle cotisation sur les revenus financiers et dividendes que les entreprises se versent entre elles. Mais le second levier est le plus important. C’etst la modulation, par un taux de cotisation plus élevé pour les entreprises qui « taillent dans l’emploi, les salaires, la formation ». En fait pour les entreprises qui n’augmentent pas les salaires et l’emploi comme la moyenne de leur branche, ou ne pratiquent pas l’égalité salariale femmes/hommes. Un dispositif similaire à celui qui existe pour la cotisation accidents du travail. Or on le noie dans un ensemble non structuré. L’idée est celle-ci : l’objectif est d’accroitre les cotisations, l’emploi et d’instaurer la parité salariale. Mais le moyen, ce n’est pas en le décrétant, c’est en créant ce levier par la modulation à la hausse qui pèse sur le comportement des entreprises. Nous avons donc 2 propositions de financement principales, les autres (égalité salariale, augmentation des salaires, etc.) sont des objectifs. Il nous faut un matériel qui communique bien dans ce sens. C’est fondamental, car c’est sur les moyens que le débat est fondamental, non seulement à gauche mais dans tout le mouvement social.

Et ces propositions rassemblent quand on ose les porter, comme le montre l’appel que nous avons lancé pour « une réforme de progrès social et de civilisation ».

Je propose que nous ayons un dispositif de travail dans la perspective du 6 juin et de la votation citoyenne :

  • Elaboration du tract avec nos propositions ré-organisées pour être clairement indiquées
  • Réunions publiques, débats et assemblées partout par les communistes (1 par département : 90 assemblées ?)
  • Formation des communistes pour ces débats et assemblées
  • Appel à conférence citoyenne et sociale pour le financement, avec une initiative du PCF à construire en ce sens
  • Proposition de loi sur la sur-cotisation et modulation
  • Un collectif de travail désigné en ce sens
  1. Europe

Les nuages s’amoncèlent : guerre et crise économique profonde. Une crise bancaire et financière est entamée, comme l’a indiqué Véronique dans son rapport en citant un extrait de mon article à paraître dans Economie & Politique. La crise économique « réelle » est déjà palpable avec l’extension de la pauvreté, les hésitations sur le chômage… et une quasi-récession dans plusieurs pays de la zone euro, dont l’Allemagne (évolution du PIB -0,5% puis 0,0% ces deux derniers trimestres…).

Et pourtant la BCE cogne en augmentant ses taux ! L’austérité des dépenses sociales et publiques est en route, tandis que l’économie de guerre bénéficie d’un boost ahurissant. Cela confirme tout ce que nous avancions dans notre texte adopté au congrès.

A l’inverse il faudrait un « quoiqu’il en coûte » pour une toute autre offre, sociale et écologique : un quoiqu’il en coûte, c’est-à-dire des avances monétaires, pour les systèmes de retraite, pur les services publics, pour une nouvelle production avec des embauches.

C’est dire si la question de l’Europe est une grande question de lutte, lutte sociale et d’idées, avant même d’être une question électorale.

Notre apport peut être décisif car nous sommes les seuls à avoir un projet qui tout à la fois refuse et combat cela, tout en avançant des propositions précises et un chemin en « pour ».

Nous ne pouvons pas être absents de ce terrain. Ni nous diluer. Ce terrain va conditionner le climat de luttes, mais aussi notre présence à la prochaine présidentielle ;

C’est pourquoi je demande que notre prochain CN, début juillet, mette à l’ordre du jour les élections européennes.

2ème intervention

  1. Je me réjouis de la clarté avec laquelle le dispositif de direction nous est présenté
  1. J’insiste sur le fait que les commissions de travail, telles la commission économique, ne sont pas des commissions de « spécialistes ». J’invite les camarades, dans leur fédération et sections, à avoir le souci de proposer à celles et ceux intéressés par les questions économiques, ou militants d’entreprises, élus, intellectuels, etc., de participer à la commission économique. Elle n’est pas, et n’a jamais été une commission constituée de seuls économistes, et c’est ce qui fait sa richesse et son originalité : elle comprend aussi des syndicalistes d’entreprises ou de services publics, ou des camarades simplement intéressés par l’économie.
  1. Concernant l’organigramme lui-même, nous en discuterons peut-être plus en détail à notre prochain CN, car il y a des recouvrements (industrie par exemple) entre plusieurs secteurs qu’il nous faut traiter par de la transversalité et des réunions communes.
  1. Concernant les déroulés du CN, nous pourrions expérimenter la chose suivante : plutôt que de viser un rapport fleuve, dans lequel chaque secteur apporte sa ou ses pages, avoir de temps en temps un point en CN par une commission : comme par exemple, un point sur la conjoncture économique.
  1. Concernant le CEN et notre direction. D’une part, je regrette qu’il n’ait pas été choisi que Denis Durand en soit membre. Son apport politique va pourtant être nécessaire avec tout ce qui se profile devant nous ! D’autre part, dans la ligne de la remarque de Guillaume et des interventions que j’ai faites notamment durant la pandémie, je veux insister sur la nécessité de se doter d’une coordination politique (ou secrétariat comme on veut) de 5 à 7 membres. Avec un CEN qui compte 40 membres, nous en avons absolument besoin. D’autant que la vie se chargera de créer un collectif, mais non officiel, pour travailler correctement. Il faudrait se doter d’un collectif identifié et en responsabilité politique.
  1. Je renforce ce qui a été dit sur l’initiative de Lure sur les services publics. J’y serai moi-même et animerai un atelier le samedi matin sur l’Europe et les services publics, en tant que membre de l’exécutif du PGE (parti de la gauche européenne).

Intervention d’Evelyne Ternant

Cette période de latence depuis notre congrès, où nous n’avons pu ni échanger ni décider en commun, m’a paru longue car la situation est devenue compliquée, tant pour le mouvement social que sur le plan politique.
Malgré sa puissance et le caractère massif, exceptionnel du soutien populaire, le mouvement social n’ a pas gagné, à ce jour, car face au verrouillage institutionnel et à l’inflexibilité du pouvoir, il n‘est pas allé au bout de ses moyens d’action pour mettre le pays à l’arrêt jusqu’à la victoire. C’est un fait social à prendre en compte. La grève est utilisée, parfois longue, pour les revendications dans l’entreprise. Pour les revendications d’ordre général, c’est le principe de la grève par délégation qui l’emporte, dont nous connaissons les limites. Ces difficultés proviennent du fractionnement du salariat, de la diversité des situations d’emplois et de protection dans l’emploi, mais aussi c’est aussi lié au poids de l’histoire du mouvement social et de ses échecs récents. Grâce à la forte mobilisation du 1er mai, l’intersyndicale entretient la flamme de la résistance, mais on sent bien qu’il faut trouver un nouveau souffle pour qu’elle ne s’éteigne pas.
Si nous faisons le bilan politique de cette séquence de mobilisation sur les retraites, deux questions se posent :

  1. Est-ce que la conscience que la retraite à 60 ans est nécessaire, possible, mais exigeante en transformations profondes a progressé ?
  2. Est-ce que, grâce aux débats publics, aux rencontres avec les citoyennes et les citoyens, avec les syndicalistes, les lignes ont bougé à gauche, est-ce que certaines divergences ont été surmontées, est-ce qu’on a progressé sur un projet commun ?

A ces deux questions, à mon avis, la réponse est non. C’est la bataille du NON qui l’a emporté dans cette séquence, avec l’idée que finalement le statut quo, c’était un moindre mal.

Pour redonner du souffle à la résistance, il faut ouvrir la perspective d’un projet alternatif. Il faut nous organiser pour pousser le débat sur ce qu’implique une vraie réforme de la retraite à 60 ans, avec l’intégration des années d’études et de formation et la question absolument prioritaire du financement. Nous avons évalué notre réforme des retraites, présentée dans le programme des Jours Heureux, à 100 milliards d’euros. La France Insoumise a évalué la sienne à 20 milliards. Ce n’est pas la même réforme. La question du financement, c’est celle de la cotisation sociale, en lien avec les créations d’emplois, c’est-à-dire la modulation de cotisation pour agir sur le comportement des entreprises.
J’approuve la proposition de referendum populaire ou de « votation citoyenne » faite dans le rapport introductif, mais à condition d’en faire en même temps un moment de construction d’un mouvement populaire du « POUR ». Sans cet effort politique de notre part sur les contenus, nous risquons de voir s’effacer les exigences de transformation sociale, en laissant la question des libertés publiques et de la démocratie- qu’il ne s’agit absolument pas de minimiser- saturer le débat public, pour le plus grand profit du RN, mais aussi des stratégies purement électoralistes à gauche, celles qui font « comme si » tout était réglé à gauche, le programme, le rapport de forces, le leadership.
Prenons dès aujourd’hui des dispositions concrètes pour mener en grand cette bataille sur les contenus transformateurs sans lesquels il n’y aura.

Intervention de Patricia Tejas

  1. Continuer à convaincre que notre projet est crédible comme rappelé dans notre document de congrès page 36 « le projet communiste passe par une révolution des rapports sociaux de production, de consommation et de répartition ».

Au moment où macron, Borne et son gouvernement veulent :

  • Conditionner le RSA et promouvoir le travail gratuit
  • Réformer la formation professionnelle et l’apprentissage au service du capital
  • Donner quelques euros aux élèves en stage dans les entreprises sur le compte du budget de l’État sans rien demander aux employeurs
  • Mettre en place France travail et non un service public de l’emploi et de la formation
  • « Partager la valeur » sans rien soumettre aux prélèvements des cotisations

Notre proposition de Sécurité Emploi Formation (SEF) est plus que jamais d’actualité, mais elle est mal connue voire pas connue des militants et militantes encore moins des adhérents et adhérentes. Il faut donc engager une formation très rapidement.

  1. Comme l’a expliqué Evelyne Ternant, oui il y a eu et il y a encore un phénomène de grèves délégataires dans la bataille toujours d’actualité contre la réforme des retraites. Par exemple dans les trois versants de la fonction publique (5 millions de salariés), les taux de grève sont très bas et les reconductions minoritaires. La tentation a été grande et avérée de déléguer par exemples aux camarades énergéticiens et cheminots les actions dans la durée.
  1. J’attire votre attention sur la criminalisation de l’action militante, qu’elle soit politique ou syndicale. Les gardes à vue se multiplient, les convocations devant la justice aussi. Le parti doit être extrêmement vigilent, réactif et ne pas laisser intimider les camarades.
  1. Enfin j’attire votre attention, parce ce que formulée par un camarade sur une radio de grande écoute, sur la tentation de repousser à 2027 une hypothèse de victoire pour lutter contre toutes les réformes régressives et porter notre projet. Pour le parti communiste nous ne pouvons attendre et réaffirmer que le changement est possible tout de suite et maintenant….

Intervention d’Amar BELLAL

Etre identifié à des enjeux d’avenir

Un de nos défis à relever c’est d’être identifié aux enjeux d’avenir et ne plus systématiquement être associé au passé même lorsqu’on fait mine parfois de nous rendre hommage. Il se trouve que nous nous facilitons pas la tâche avec notre propension à mettre beaucoup d’énergie dans les commémorations et les célébrations historiques, ce qui contribue aussi à cette image. Je ne dis pas qu’il faut renoncer à ces rdv bien sur, moi même je suis venu au parti -entre autre- au regard de son apport historique, mais j ‘aimerais qu’on puisse mettre la même énergie et avoir les même réflexes pour organiser des événements de réflexion autour du climat, de la biodiversité, du numérique, de la recherche etc…

l’appropriation des enjeux écologiques

L’ autre défi c’est l’appropriation des militants, y compris les militants à tous les niveaux jusqu’à la direction nationale que nous sommes, sur les enjeux de l’écologie. On a le contenu, mais ce n ‘est pas encore approprié. Il faut dire qu’on a peu à peu intériorisé l’idée que le PCF n a pas voie au chapitre sur l’écologie, qu’il n’ a rien d ‘original à dire sur ces sujets. Pourtant sur beaucoup de luttes écologiques on a été concrètement précurseurs ! Je pense par exemples aux luttes des maires de municipalités bordant le Rhone à la fin des années 70 pour protester contre les pollutions des usines chimiques et qui ont abouti à une des premières législation ambitieuse contraignante pour les industriels et qui ont aussi conduit à la création du MNLE (Mouvement de lutte pour l’environnement). La géothermie a été développé très tôt par des département communistes, dans le Val de marne et la Seine st denis, qui disposent du parc de logements le plus important d’Europe chauffé avec cette énergie ! On peut aussi évoquer les nombreuses action autour de la biodiversité en créant des parcs protégés. Et aujourd’hui même, nombreux sont les militants communistes à l initiative de luttes pour la conservation ou l’ouverture de nouvelles lignes de train, il y a des centaines de luttes locales en France de ce type : c’est aussi de l’écologie ! Et peut être que montrer cela à travers une grande carte de France recensant toutes ces luttes serait vraiment utile.

Travailler à des scénarios

Enfin pour travailler à notre crédibilité, il faut sur de grands sujets, donner notre vision à court, moyen, et long terme. Faire des scénarios sur la gestion de l’eau, la transition agricole, sur les objectifs énergie-climat, la biodiversité… tracer une perpective jusqu’à 2050. De nombreux Think Tank font cet exercice, et un parti sérieux comme le notre devrait se plier à cet exercice. D’autant plus qu’à la différence de nombre d’entre eux , dont des personnalités célèbres pour leur talent de vulgarisation des questions énergétiques, ils s’inscrivent tous dans le capitalisme, et ils se gardent bien de remettre en question sa logique. On pourrait nous au contraire proposer des scénarios qui s’incrieraient dans une sortie du capitalisme et de ses logiques, sur tous ces sujets : ce qui ouvriraient d’autres possibilités et nous libereraient de contraintes.

Retraite et réchauffement climatique

Pour terminer, notons le rapport du CESE sur l’évolution des conditions de travail et le réchauffement climatique actuel et futur qui est édifiant au regard de la reforme des retraites. Il apparaît clairement que travailler jusqu’à 64 ans dans une France qui peut connaître un réchauffement de 4 degrés (on est déjà autour de 1,7), ce n’est pas crédible pour des raison évidentes de santé et fatigue. Cela apparaît pleinement comme une mesure injuste, ça on le savait, mais pas seulement, c’est aussi une mesure impossible à appliquer avec le réchauffement climatique s’aggravant, mesure qu’on pourrait verser au chapitre de la « mal-adaptation » : on voit que l’adaptation au réchauffement climatique ce n’est pas seulement de la technique, mais aussi des dispositions sociales.

0 comments on “Conseil National du 6 mai 2023: interventions de Jean Marc Durand – Denis Durand – Frédéric Boccara – Evelyne Ternant – Patricia Tejas – Amar Bellal

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :