39ème congrès Conseil National

Interventions au CN du PCF des 4 et 5 février 2023

Nous publions les interventions devant le Comité National des 4 et 5 février 2023 Frédéric Boccara, Amar Bellal, Denis Durand, Jean Marc Durand

Fréderic Boccara

1- Le vote des communistes à 82% pour le texte proposé par le conseil national confirme le choix de réorientation fait au 38è congrès, puis pour l’élection présidentielle, le choix de sortir de l’effacement et de pousser l’originalité communiste, la développer et la donner à voir.

2- Sont devant nous, à présent, des chantiers de travail pour un PCF agissant et utile à un changement profond de société, un changement révolutionnaire.

Ce sont les chantiers de la novation communiste :

  • Celui d’une sécurité d’emploi ou de formation (SEF) ;
  • Celui d’une nouvelle civilisation dont l’exigence ne cesse de monter, une nouvelle civilisation c’est-à-dire à la fois une tout autre anthroponomie ― un autre sens et d’autres règles à la re-génération humaine ― et une tout autre économie, tout particulièrement d’une autre relation à l’argent ;
  • Celui d’institutions nouvelles, ce qui implique un rapport renouvelé aux élus et aux luttes
  • Celui de l’organisation du PCF
  • Celui de la formation, de l’appropriation et du développement de la théorie marxiste, en particulier : sur le capital et l’Etat, sur le lien entre social et sociétal, les révolutions anthroponomiques qui montent et les réactions des conservatismes exacerbés, sur l’analyse du capitalisme et de la crise du CME, l’analyse des nouvelles multinationales et de la révolution informationnelle, sur l’écologie ;
  • Celui enfin du monde et de l’internationalisme, d’un nouveau fonctionnement du monde, d’une nouvelle organisation

3- Je veux m’arrêter un instant sur cette question de l’état du monde et du besoin urgent d’une tout autre mondialisation. Nous avons la guerre, une guerre entre deux impérialismes et deux capitalismes (Russe et Etats-Unien), nous refusons la livraison d’armes ― fort heureusement, après l’épisode choquant du vote de la résolution à l’assemblée nationale ― et nous devons affirmer l’urgence de sortir de l’OTAN. Ce dernier point serait, en particulier, décisif pour parler à tous les belligérants et progresser vers une paix plus juste et viable. Mais il y a aussi les souffrances considérables des pays du Sud, parfois sous-estimées je crois, la domination du FMI, pas assez mise en lumière, et l’attaque du capital contre tous les peuples avec la hausse des taux d’intérêt par les banques centrales des pays capitalistes dominants, hausse soutenue encore cette semaine par le FMI au risque assumé d’une récession mondiale.

Tout cela pour dire que je pense que nous sommes à un tournant historique d’exigence extrêmement urgente d’un tout autre état du monde, d’une autre mondialisation. Je reviens de Cuba, où j’ai participé aux 5èmes rencontres internationales José Marti « pour un autre équilibre du monde », avec 1.200 délégués et contributeurs de plus de 80 pays. Eh bien, nous devons comme le propose Fabien dans son rapport lancer une grande campagne de solidarité contre le blocus dont Cuba est victime. Mais nous devons aussi ne pas nous en tenir à la solidarité. Notre internationalisme doit être aussi un internationalisme de batailles communes. Il faut lancer en même temps une bataille contre le dollar et pour une monnaie commune mondiale alternative à celui-ci, affectée au développement des services publics et de l’emploi, appuyant notre campagne pour le partage des savoirs et des technologies, au lieu des monopoles dont le blocus fait partie.

C’est d’ailleurs non seulement dans ce sens, de luttes pour une autre mondialisation de partage avec le rôle décisif des critères d’utilisation de tous les fonds, que je suis intervenu à la conférence internationale et que j’ai discuté avec mes homologues cubains. Mais c’est aussi la réponse implicite du président cubain Diaz-Canel revendiquant « une mondialisation et la solidarité » (Fidel), avec des exigences de partages, à Y. Varoufakis, l’ancien ministre des Finances de la Grèce qui, au nom de « l’internationale progressiste » insistait de façon nationale sur la « souveraineté » et sur les élections, sans exigences précises sur les institutions internationales.

Cet enjeu ne va faire que monter. Nous devons le prendre de façon offensive, faisant monter en régime la bataille pour une autre Union européenne, pour un autre rôle de celle-ci vis-à-vis des Etats nationaux et dans le monde. J’insiste sur le caractère décisif que vont revêtir les élections européennes de 2024. Il ne faut pas les refouler mais, au contraire, les préparer bien en amont par une bataille de fond.

4- Avec la grande bataille sociale actuelle sur les retraites en France nous sommes, en quelque sorte, dans les travaux pratiques de la novation communiste comme je le dis dans l’éditorial d’Economie & Politique.

Travaux pratiques pour articuler « contre » et « pour ». S’exprime la vision gauchiste ou sociale-démocrate selon laquelle qu’il n’y a pas besoin d’une réforme. La macronie prête à toute la gauche cette vision conservatiste qui nie les problèmes. Pour notre part, nous insistons sur le besoin de réforme, car le besoin de revenir à 60 ans est urgent comme celui de changer le travail et de créer des emplois, massivement et tout autres, et car cela exige des réformes radicales sur les financements. Et nous devons insister : cette bataille « pour » une autre réforme renforce le « contre », le rejet du projet Macron-Borne. Car on est d’autant plus contre un mauvais projet que l’on voit qu’il faut faire autrement, et qu’on le peut.

Travaux pratiques pour une nouvelle civilisation d’un temps libéré ― mais articulé au travail, à l’image de ce que doit être la retraite par répartition ― et d’une nouvelle relation à l’argent, aux pouvoirs sur l’utilisation de l’argent, aux entreprises. Une bataille qui ne se cantonne pas à des exigences « sociétales », qui les articule avec tout le reste.

Travaux pratiques de la SEF, aussi, avec tout particulièrement la bataille que nous devrions lancer, au sein même du mouvement, pour des pré-recrutements dans la fonction publique (100.000 à l’hôpital, 50.000 dans l’éducation, mais aussi dans le transport ferroviaire ou dans le service public de l’énergie) : avec une promesse d’embauche, une formation, un pré-salaire donnant lieu à cotisation, ils consolideraient tout de suite le système, financièrement, et à terme par l’apport de ces jeunes pré-recrutés lorsqu’ils travailleront : apport à la société en termes de santé, éducation, transport écologique et apport au financement du système par les richesses qu’ils créeront.

Voyons bien l’immense exigence de formation et la centralité que tend à prendre la dualité formation/emploi.

Travaux pratiques sur les idées aussi. Premièrement, nos propositions alternatives d’un autre financement : une taxation des revenus financiers des entreprises (les dividendes qu’elles s’échangent, en particulier) mais aussi, ce qu’on à tendance à omettre, un levier pour emmener les entreprises vers une tout autre gestion, avec la surcotisation pour les entreprises qui taillent d’ans l’emploi, les salaires, l’égalité femmes-hommes, qui est une modulation à la hausse des cotisations sociales. Deuxième idée, éclairer sur les causes de la réforme voulue par E. Macron : c’est que le capital a faim, faim de profits, avec la hausse des taux et avec son gonflement gigantesque.

5- J’insiste, avancer nos propositions renforce l’ensemble des propositions. Si nous la portons bien, l’originalité communiste renforce la gauche et le mouvement. Et nous sommes capables de le faire.

Notre projet, c’est une ambition sur l’objectif : la retraite à 60 ans, pour le cas général et plus tôt pour de nombreux métiers ; la prise en compte des années d’études ; un autre travail et de meilleurs salaires. Et sur le financement, notre projet est capable de faire bouger l’ensemble de la gauche. Elle s’exprime de plus en plus en faveur de la taxation des dividendes …. mais parfois en se restreignant à ceux reçus par les ménages au lieu d’insister sur les dividendes reçus par les entreprises. Elle avait commencé, en 2020, à s’exprimer aussi en faveur d’une forme de modulation et de pénalisation du comportement des entreprises, mais encore trop flou et très limitée (surcotisation pour certains contrats précaires notamment, mais pas pour l’ensemble de la politique d’emploi).

Il s’agit d’emmener les entreprises vers un chemin de progrès.

Nous devrions proposer dans les jours qui viennent un argumentaire à nos camarades, notamment pour les meetings départementaux.

Permettez-moi de souligner l’Appel pour une autre réforme et avec des propositions précises que j’ai pu lancer avec des dirigeants syndicaux (CGT, CFE-CGC, FSU, SNES, SUNIPP, SNESUP, SUNEP, SNEP), responsables d’organisation de jeunesse (JOC, Unef, Voix lycéenne, JC, UEC), des responsables d’associations écologiques représentées au CESE, des intellectuels et personnalités (R. Gori, G. Perret, P. Krasucki, P. Caillaud-Croizat).

Permettez-moi de remarquer que nous ne jouons pas assez collectif là-dessus : alors que d’autres (comme Politis) promeuvent des appels, au contenu mince, l’Humanité, qui s’est pourtant déplacée à la conférence de presse de l’appel, ne cherche pas sa mise en valeur, sa promotion. Pourtant, en toute autonomie bien sûr, nous devrions nous épauler, nous renforcer les uns et les autres. En 1995, la contribution très active, et quasi-quotidienne, de l’Humanité au lancement et à la promotion d’un appel de cette nature avait très fortement contribué à la force du mouvement, à son élargissement et à la bataille d’idées.

Voyons bien que cette démarche porte l’idée du lien entre des exigences de civilisation, une tout autre production, la centralité d’un développement de l’emploi-formation, et une autre utilisation de l’argent, appuyée sur de nouveaux pouvoirs démocratiques et une autre culture.

Ces questions sont décisives pour tous nos combats. Mais elles ne progresseront pas « naturellement », surtout avec la force des idées fascisantes, celles de conciliation et de renoncement ou les simplismes. Une démarche volontaire de l’Huma sur l’appel serait jouer collectif pour la gagne. Les idées n’avancent pas toutes seules et la passivité sur les idées n’est pas révolutionnaire…

Les résultats du vote de la base commune du 39ème congrès est un résultat remarquable.

  • Il confirme dans un temps pas facile, alors que les coups tombent de partout, invitant au repli, un choix d’orientation fait au 38ème congrès, choix qui était même si on l’a peu dit, un vrai évènement politique.

Un signe fort, clair, novateur vers la construction d’un parti communiste nouveau et du même coup, un vrai signal pour la mise en route d’une phase politique, sociale, économique nouvelle pour notre pays.

  • Il affirme la volonté des communistes de disposer d’un parti indépendant, autonome dans son fonctionnement, ses prises de décisions, son action. Un parti qui se fixe des objectifs et qui se donne les moyens de les atteindre. Un parti qui loin d’abandonner l’idée du rassemblement à gauche, crée véritablement les conditions de le construire par son apport original sur les idées, en termes de propositions, de contenus et de projet. Un parti qui mène le combat contre le capital pour le dépasser son système et non l’aménager.

Jean-Marc Durand

Le résultat du vote de la base commune du 39ème congrès est remarquable.

  • Il confirme dans un temps pas facile, alors que les coups tombent de partout, invitant au repli, un choix d’orientation fait au 38ème congrès, choix qui était, même si on l’a peu dit, un vrai évènement politique tant il était porteur de novation et d’un nouveau champ du possible pour le Pcf, en fait pour le communisme.

Un signe fort, clair, responsable vient une seconde fois en 4 ans, d’être envoyé pour la re-construction d’un parti communiste révolutionnaire qui, en ce début de 21ème siècle prenne toute sa place dans le débat politique et porte une transformation radicale de la société. C’est du même coup, un vrai signal envoyé à toute la société pour la mise en route d’une phase nouvelle de lutte politique, économique sociale et écologique.

  • Ce vote affirme donc en même temps la volonté des communistes de disposer d’un parti indépendant, autonome dans son fonctionnement, ses prises de décisions, son action. Un parti qui se fixe des objectifs et qui se donne les moyens de les atteindre. Un parti qui loin d’abandonner l’idée du rassemblement à gauche, crée véritablement les conditions de le construire par son apport original sur les idées, en termes de propositions, de contenus et de projet. Un parti qui mène le combat contre le capital pour dépasser son système et non l’aménager.

Articulé à la personnalité et à la popularité de Fabien, tout cela a donné le résultat net et sans ambiguïté qu’on a connu le dernier dimanche de janvier.

Maintenant le travail qui nous attend est très important. Il consiste à amender pour les améliorer les deux documents que les communistes vont avoir entre les mains : le projet de base commune adopté et le projet de révision des statuts tel qu’il va ressortir de notre conseil national. Par le débat et la discussion entre tous les communistes, il s’agit d’en faire des documents qui vont constituer à, la fois le but et le chemin que se seront fixés et qu’emprunteront chacun.e de nous après le congrès de Marseille. Il s’agira de nous donner les moyens d’irriguer l’ensemble de la société d’une orientation politique qui donne clairement à voir notre volonté et notre capacité à engager une vraie libération de l’exploitation capitaliste et des dominations qu’incarnent l’ordre néolibéral.

Nous avons d’ailleurs de quoi passer sans tarder aux exercices pratiques. D’une part avec la bataille en cours contre le projet de réforme des retraites. Certes il s’agit de faire retirer le projet Macron / Borne mais attention aux chausse-trapes. Si nous en restions à la seule dénonciation, au seul retrait nous risquerions rapidement de nous retrouver dans une sorte d’impasse. L’éviter c’est mettre le cap sur l’alternative. Il s’agit de donner un sens à la lutte, une visée réellement émancipatrice car on dénonce d’autant mieux un projet qu’on a autre chose à proposer, à mettre en perspective. Cela fait partie du débouché politique, chose qui manque cruellement aux luttes depuis de nombreuses années. En ce sens la proposition de referendum qu’a faite Fabien constitue une partie d’un nécessaire atterrissage politique.

D’autre part, un autre exercice pratique va consister à savoir nous doter au plan opérationnel d’un parti en phase avec les orientations dont il se sera doté. Quel mode de vie, quel fonctionnement, quelle organisation ? Tout cela pour répondre à un besoin nouveau de souveraineté et de prise d’initiative des communistes. Pour cela il faut qu’ils disposent d’espaces de vie, d’expression, d’organisation, d’instances, dans lesquelles elles et ils pourront expérimenter, décider, agir. Nous sommes dans un temps où nous allons devoir apprendre à adapter nos formes et nos modes d’intervention afin d’être en capacité de répondre efficacement aux ambitions transformatrices de la société que nous portons. En ce sens donner toute leur place à nos nouveaux et nouvelles adhérents.es, notamment par un effort considérable de formation constitue un des importants leviers à notre disposition. De quoi nous rappeler en même temps l’enjeu que représente notre renforcement et la nécessité de mener sur cette question de vraies campagnes.

Amar BELLAL

Analyse des résultats

Il y a d’abord le message politique principal de fond qui est envoyé par ce vote (82 % pour le texte soutenu par Fabien Roussel et la direction sortante, et 18% pour le texte alternatif pour rappel), à savoir amplifier et confirmer l’orientation prise lors du 38 -ème congrès. En effet pendant longtemps nous faisions le raisonnement que s’effacer dans les moments électoraux clés comme les présidentiels au profit d’autres candidats, participaient au rapport de force pour renforcer la gauche et en faisant le calcul qu au fond le peuple jugerait à sa juste valeur notre démarche. En réalité, la gauche s’est progressivement affaiblie, et quant à nous, en disparaissant des élections, on nous a tout simplement oublié. A partir de ce constat, les communistes ont choisi de passer à autre chose depuis 4 ans, et on le voit encore récemment avec la mobilisation sur les retraites, au contraire, c’est en existant que le PCF contribue à rassembler et mobiliser la gauche et non pas en s’effaçant. L’autre message c’est une volonté de rassemblement nette des communistes sur un seul texte, qu’ils ont considéré comme base sérieuse de discussion. Je ne suis pas d’accord avec ce qu’affirme Pierre Laurent : au contraire je crois que nombreux sont les communistes qui ont lu les 2 textes et ont donc choisi en toute connaissance de cause.

Tout le monde a été surpris par ce résultat assez tranché. Je pense qu’on a sous estimé le niveau d’information des communistes, leur exigence quand à la qualité de l’argumentation et la cohérence d’une ligne politique : aujourd’hui, en partie grâce aux supports numériques, presque tout se sait sur les débats et positions internes des uns et des autres, et le niveau d’information des militants est comparable à celle d’un membre du CN par exemple. Je pense que c’est ce qui explique en partie l’ampleur de ce vote. Cela ne suffit pas d’aligner des noms de personnalités et de compter sur le légitimisme ou une forme de crédulité pour convaincre les militants de voter pour un texte, ils ne se laissent plus impressionner par ce type de démarche, par des arguments d’autorité ou encore un alignement de mots clés : au contraire ils sont exigeants et il faut sans cesse prouver par la qualité du contenu, qu’un texte peut prétendre devenir une base commune. Lorsque nous avons rédigé le texte des « jours heureux », c’est cet état d’esprit qui nous a animé : nous n’avons jamais considéré que – parce que c’était le texte de la direction sortante – alors forcément les communistes allaient lui donner une majorité (rappelons nous le précèdent du 38 ème congrès). Au contraire nous nous sommes efforcés de respecter les militants en haussant au maximum du possible la qualité du texte et tendre à l’ exhaustivité des sujets traités pour qu’il soit digne de devenir la base commune choisi par une majorité.

Les prochains mois et années

Que faisons nous de la popularité de Fabien Roussel, pour qu’elle puisse contribuer à renforcer le parti ? comment transformer durablement cette période exceptionnellement favorable à nos idées incarnées par notre secrétaire national ? C’est un moment qui j’espère va durer le plus longtemps possible, mais il est important de saisir cette chance que nous avons. L’histoire c’est aussi fait de chance, de chance à saisir, et pendant que cette popularité est là, c’est maintenant qu’il faut en profiter.

Comment rendre des idées incontournables, majoritaires ? Je vais citer quelqu’un qui n’est pas du tout apprécié ici : Nicolas Sarkozy. Il avait lancé à des journalistes pendant sa campagne présidentielle de 2007 : « il me faut une année pour faire monter une idée ». J’aimerai bien que nous réussissions un jour à avoir cet état d’esprit, à avoir la culture de la bataille idéologique et à la prendre au sérieux. Aujourd’hui le parti trop souvent se résume à l’action de ses élus. Il est vrai que c’est une force, et avec des centaines de collaborateurs qui travaillent sur des dossiers du local au national qui nous permettent d’avoir une expertise sur un tas de sujet. Mais toute cette machinerie pompe énormément de notre énergie, occupe les meilleurs éléments du parti : c’est encore une fois utile, j’ai moi-même toujours milité pour des accords nous permettant d’avoir un maximum d’élus, mais ce qui m inquiète, c’est le décalage croissant entre les moyens et l’énergie consacré à la gestion dans les institutions, en comparaison à ce que l’on consacre en moyens humains dans les batailles idéologiques et les campagnes d’idées dans le parti. C’est sans communes mesure, très peu de moyens sont consacré à la bataille des idées. Il faut changer cette culture dans le parti et rééquilibrer les choses.

Enjeux écologiques et mobilisation sur les retraites : contradiction à surmonter

On entend très peu les intellectuels de l’écologie, de l’énergie sur le sujet des retraites. Ilsd ne prennent pas positions personnellement pour le mouvement. Il y a cette idée qui traine chez eux que la diminution des revenus, la diminution du PIB est inévitable pour régler les problemes des rejets de CO2, de la pollution et des ressources. C’est une bataille d’idée à mener : montrer qu’il peut y avoir un découplage entre pollution et PIB, que la croissance du PIB ce n’est pas forcement plus d’atteinte à l’environnement, que l’enjeu c’est surtout le contenu de cette croissance : plus de profs, plus de médecin, d’infirmiers, de train, de service public etc…

Denis Durand: intervention 1

Un parti qui veut une société communiste et le chemin pour y arriver, avec la conquête de pouvoirs démocratiques par les citoyens, et par les travailleurs dans l’entreprise, doit évidemment être très différent, dans son organisation et dans son fonctionnement, des partis bourgeois limitant leur activité aux élections et à l’action parlementaire, ou des mouvements au service d’une ambition présidentielle.

Nous avons besoin d’un parti en état d’agir en permanence et de façon continue aux côtés de la population et en liaison avec elle, dans les entreprises comme sur les territoires. Il faut pour cela une organisation proche de la vie des gens, dotée de l’organe de proximité irremplaçable que sont les cellules. Je comprends que le projet actuel de statuts va dans ce sens, je propose des amendements pour clarifier ce point et ce qu’il implique, notamment sur le fonctionnement des sections.

Il faut aussi des instances de direction opérationnelles, du niveau local au niveau national. La tâche d’une direction n’est pas de chercher le point d’équilibre entre les différentes composantes du parti à un instant donné, elle est de prendre des initiatives pour donner à chaque adhérent les moyens de mobiliser tout le potentiel de créativité que recèle notre organisation dans la mise en œuvre des orientations décidées au congrès. Il faut un véritable organe collectif, émanation du conseil national, qui joue ce rôle d’animation au quotidien entre les réunions du comité exécutif national. C’est pourquoi je propose que nos statuts prévoient la désignation claire et transparente d’un secrétariat national, chargé de l’animation de toute la vie du parti entre les réunions de l’exécutif, et responsable devant le conseil natioDenis Durand

Un parti qui veut une société communiste et le chemin pour y arriver, avec la conquête de pouvoirs démocratiques par les citoyens, et par les travailleurs dans l’entreprise, doit évidemment être très différent, dans son organisation et dans son fonctionnement, des partis bourgeois limitant leur activité aux élections et à l’action parlementaire, ou des mouvements au service d’une ambition présidentielle.

Nous avons besoin d’un parti en état d’agir en permanence et de façon continue aux côtés de la population et en liaison avec elle, dans les entreprises comme sur les territoires. Il faut pour cela une organisation proche de la vie des gens, dotée de l’organe de proximité irremplaçable que sont les cellules. Je comprends que le projet actuel de statuts va dans ce sens, je propose des amendements pour clarifier ce point et ce qu’il implique, notamment sur le fonctionnement des sections.

Il faut aussi des instances de direction opérationnelles, du niveau local au niveau national. La tâche d’une direction n’est pas de chercher le point d’équilibre entre les différentes composantes du parti à un instant donné, elle est de prendre des initiatives pour donner à chaque adhérent les moyens de mobiliser tout le potentiel de créativité que recèle notre organisation dans la mise en œuvre des orientations décidées au congrès. Il faut un véritable organe collectif, émanation du conseil national, qui joue ce rôle d’animation au quotidien entre les réunions du comité exécutif national. C’est pourquoi je propose que nos statuts prévoient la désignation claire et transparente d’un secrétariat national, chargé de l’animation de toute la vie du parti entre les réunions de l’exécutif, et responsable devant le conseil national.

Denis Durand : intervention 2

À une majorité de 82 %, et en toute connaissance de cause puisqu’ils avaient la possibilité de voter pour une autre orientation, les communistes ont fait un choix clair : ils veulent que leur parti ne soit pas seulement une composante de la gauche institutionnelle mais qu’il soit un parti communiste, c’est-à-dire un parti qui veut une société communiste et qui agit pour l’atteindre. Cela veut dire deux choses : d’abord qu’il ne veut pas seulement aménager la société actuelle en crise, mais construire une civilisation radicalement nouvelle, émancipée de l’exploitation capitaliste et des dominations institutionnalisées par le libéralisme bourgeois, une civilisation de partage et de liberté accrue pour tous les êtres humains, sur une planète vivable. Ensuite, il veut les moyens d’atteindre ce but. La base commune énonce les voies de cette transition socialiste, de l’état actuel vers une civilisation communiste. Dans ce domaine, les débats préparatoires au congrès ont déjà permis de faire des pas importants en avant, par exemple dans l’appropriation par le Parti de notre proposition de sécurisation de l’emploi et de la formation. La base commune souligne qu’il s’agit là d’un processus révolutionnaire, qui passe par un affrontement durable et radical entre cette logique communiste et la logique capitaliste qui domine tout aujourd’hui, et qui rend nécessaire l’action organisée d’un parti révolutionnaire, dans les luttes sociales, sociétales et écologiques, dans la bataille d’idées et dans les institutions.

Déjà, on a pu remarquer que dans la mobilisation d’aujourd’hui pour les retraites, l’apport du PCF est très important. À la fois pour prendre des initiatives unitaires, dans le cadre de la NUPES ou dans des cadres plus vastes donnant la parole aux syndicats, par exemple ; et à la fois avec des propositions qui placent la bataille actuelle dans une perspective de civilisation. Le mouvement ne l’emportera que s’il voit dans la mise en échec du projet Macron-Borne non pas un maintien du statu quo mais l’ouverture d’une nouvelle perspective de progrès social. C’est ce à quoi nous contribuons en proposant de dépasser la coupure capitaliste des âges de la vie entre périodes d’exploitation de la force de travail et rejet de cette force de travail dans le chômage ou dans une retraite conçue comme sa mise au rebut lorsque l’exploitation l’a irrémédiablement usée.

La montée de l’exigence d’une création massive d’emplois pour les jeunes, comme l’émergence spectaculaire de la revendication d’une prise en compte des années d’études dans la durée d’assurance ouvrant droit au taux plein dans le calcul de la retraite est très significative de cette montée d’une nouvelle perspective de sécurisation de tous les moments de la vie, avec des activités prenant successivement la forme d’un emploi productif, de périodes de formation initiale et continue, et d’une retraite active, permettant à chacune et à chacun de continuer à déployer ses capacités après 60 ans dans des activités librement choisies.

Cette configuration me semble favorable au lancement d’une campagne nationale d’adhésion au PCF, présentée explicitement aux citoyens comme un appel à développer leur apport personnel à l’action d’un parti rassemblé, à l’action du parti le plus dynamique dans la bataille en cours pour en faire naître une perspective de progrès, avec en Fabien Roussel un porte-parole très populaire.

Ce choix donne à la direction du PCF, celle d’aujourd’hui et celle qui prendra le relai dans trois mois, une responsabilité énorme qui peut intimider. Mais que pourrions-nous craindre ?

Des craintes sur l’unité du parti ? Mais avec le vote de la semaine dernière, l’unité du parti est là, dès le vote de la base commune. Elle permet entre nous le débat le plus ouvert et le plus serein. Quiconque proposera d’aller hardiment dans la voie tracée par le texte que nous adopterons à Marseille rassemblera le parti.

L’enjeu est désormais de nous donner tous les moyens d’aller dans cette voie, et c’est l’objet du débat sur la modification des statuts.

Evelyne Ternant

Il y a à la fois des avancées dans le projet de statuts et des manques, qui donnent une impression «d’entre deux».
Parmi les avancées, la promotion de la cellule pour redonner aux adhérents les capacités d’initiatives de proximité, car nous avons perdu beaucoup de liens avec des adhérents qui ne se déplacent pas aux AG de section et dont la souveraineté est plus théorique qu’effective. L’existence d’un comité de section va permette d’organiser des interventions efficaces, et l’organisation du parti à l’entreprise est une confirmation importante d’un choix rappelé au dernier congrès. C’est en effet sur les lieux de travail que notre projet qui combat le capital, ses pouvoirs et sa logique rentre le mieux en résonance avec ce que vivent les salariés.
L’accent mis sur la formation dans le projet est très important. C’est en effet par la formation des militants que peut se construire le socle idéologique et politique commun, qui assure une cohésion et cohérence internes, et permette de dépasser dans le débat les différences de points de vue qui traversent le parti sur la stratégie. Même si la formation a été délaissée dans le parti pendant des années, il demeure malgré tout, hérité de notre longue histoire, une solidité, une colonne vertébrale politiques qu’on nous envie à gauche. La gravité de la crise systémique et les exigences de la bataille politique nous obligent à un immense effort d’information pour qu’un maximum de camarades s’approprient la cohérence de notre projet.
J’ai des réserves à exprimer sur deux parties du projet de statuts : celle qui concerne la direction nationale et l’organisation du parti en région.
Nous devons faire en sorte que les instances de la direction nationale que sont le CN et le CEN fonctionnent mieux, c’est à dire soient mis en situation de prise de décision effective, conformément à leurs attributions. Le parti fonctionne au sommet de façon très cloisonnée et centralisée. Les commissions font un énorme travail, nos revues sont des lieux de foisonnement d’idées novatrices, mais ça ne diffuse par dans le parti, pas même au CN. J’estime qu’il devrait que chaque responsable de commission, et chaque directeur de nos revues devrait être auditionné par le CN une fois par an pour prendre connaissance des idées et propositions nouvelles qui ont traversé leurs réflexions et travaux. Notre action au jour le jour a besoin de se nourrir de ces analyses pour mieux articuler les objectifs immédiats et les propositions transformatrices.
Il y a besoin d’un secrétariat national, c’est à dire un groupe dirigeant restreint, connu et nommé, qui se réunit fréquemment et le cas échéant dans l’urgence, pour diriger le parti entre les réunions du CEN (une toutes les deux semaines). Aucune instance ne peut être dirigée dans la continuité et la réactivité sans un secrétariat, qui permet d’assurer à la fois l’efficacité et la collégialité des décisions, donc de ne pas tomber dans le travers de la présidentialisation.
Ce secrétariat existe aujourd’hui forcément, d’une façon ou d’une autre: ne pas le reconnaître, ne pas le nommer, ne pas faire en sorte qu’il soit tenu de rendre des compte de son activité et de ses décisions au CEN et au CN revient à faire fonctionner une structure de l’ombre, et à accepter l’opacité dans la prise de décision. L’existence officielle d’un secrétariat est un point très important d’amélioration du fonctionnement de la direction nationale.
Je ne suis pas satisfaite de la rédaction du paragraphe concernant la région, qui ne met pas fin aux difficultés historiques qu’éprouve le parti pour s’adapter à la nouvelle organisation territoriale et être en capacité de mener les batailles politiques sur les enjeux régionaux. Les régions sont devenues un échelon stratégique pour les politiques publiques dans des secteurs aussi importants que le développement économique, la formation professionnelle, les transports, l’enseignement secondaire et supérieur, la transition énergétique, la gestion des fonds européens.
Il y a besoin d’intensifier notre intervention à cet échelon, en lien avec les élus régionaux, pour faire reculer les logiques de concurrence et de soumission au capital, et porter des projets résolument tournés vers les besoins des populations. Les comités régionaux sont inscrits dans les statuts depuis longtemps mais ne fonctionnent pas loin de là dans toutes les régions. Les secrétaires régionaux n’ont pas été réunis depuis des années. Il faut donc des statuts plus précis et plus impératifs sur le sujet, et une volonté politique de la direction nationale pour veiller à leur fonctionnement, qui réglerait bien des problèmes rencontrés dans les élections régionales s’ils étaient réunis régulièrement pour des actions communes. De plus, une confusion a été introduite avec la création des référents régionaux, qui ont pour fonction d’assurer la liaison entre les fédérations d’une même région et la direction nationale, et faciliter les rapprochements et mutualisations de ces mêmes fédérations : ces misions n’ont rien à voir avec la réflexion et les initiatives sur les problématiques régionales, il faut donc clarifier et articuler ces deux instances régionales .
J’ai déposé des amendements sur ces sujets et souhaite bon courage à la commission pour la soirée de travail qui l’attend.

3 comments on “Interventions au CN du PCF des 4 et 5 février 2023

  1. PIERRE ASSANTE

    Très bien ! Tout à fait d’accord. Et comment ajouter de façon « audible » dans le chantier de formation, comme le faisait Politzer, la question de la pensée dialectique par rapport à la pensée de non contradiction dominante qui induit les « solutions » opportunistes de droite et de gauche dans l’action ouvrière et populaire.
    Amitiés. Pierrot.

  2. PIERRE ASSANTE

    Très bien ! Tout à fait d’accord. Et comment ajouter de façon « audible » pour tous dans le chantier de formation, comme le faisait Politzer, la question de la pensée dialectique par rapport à la pensée de non-contradiction dominante qui induit les « solutions » opportunistes de droite et de gauche dans l’action ouvrière et populaire.
    Question liée aux limites systémiques du mode de production est d’échange capitaliste.
    La non-connaissance des limites propres au développement capitaliste (baisse tendancielle du taux de profit, suraccumulation-devalorisation du capital) induit toutes les croyances à la possibilité de réformer le système sans le transformer qualitativement, radicalement, générationnellement, et par là tous les concepts sociaux-démocrates ou chrétiens démocrates et les illusions qui plombent l’efficacités des luttes revendicatives, économiques, politiques, sociales et sociétales en unité.
    C’est finalement l’idée d’un « équilibre juste » entre salaire et plus-value qui prédomine dans la pensée revendicative, et qui est exploitée et promue par le capital ici et partout pour rabaisser le niveau des besoins sociaux, « difficultés obligent ! »
    Dans la bataille des retraites, l’idée de « l’obligation par les difficultés » promues par le pouvoir recule au profit de l’énoncé des besoins par les manifestants. S’appuyer sur cette avancée idéologique peut permettre l’avancée d’une pensée contradictoire, dialectique, efficace pour les luttes, par rapport à la pensée non contradictoire millénaire qui plombe l’organisation du salariat depuis le congrès de Gotha, et bien avant bien sûr.
    Amitiés. Pierrot.

  3. « (…) pour une nouvelle civilisation d’un temps libéré ― mais articulé au travail (sic), à l’image de ce que doit être la retraite par répartition » Frédéric Boccara. Articulé ou pas, ce que nous dit le rejet ultra majoritaire de la retraite à 64 ans c’est que le temps de vivre est une exigence première. La réduction du temps de travail, sans perte de salaire, est une bataille essentielle que le mouvement ouvrier mène depuis son origine. « « Dans ce processus qu’est le communisme, arrive le moment où ce n’est plus le temps de travail mais le temps disponible qui devient la mesure de la richesse humaine. » cité par Arnaud Spire dans un texte sur le communisme, trop absent en tant que tel dans vos différents articles dont j’apprécie la qualité par ailleurs.

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