Éditos Crises, alternatives, actions

Jean Chambon : « Ne pas banaliser le 49.3 un coup de force pour imposer une austérité renforcée et destructrice ! »

A écouter Fabien Roussel et André Chassaigne, je comprends que les députés communistes ne devraient pas voter le texte actuel des insoumis si l'extrême droite prenait la décision de le voter comme elle l'a fait lors de la 1ère motion de censure !

J’ai appuyé ce samedi l’intervention de Nicolas Marchand rendue publique sur facebook et le blog de la section de Pierre-Bénite (1). Je veux aujourd’hui pousser ma réflexion, car il y a urgence. Nous vivons un week-end tourmenté, demain les députés communistes devront donner leur position sur la motion de censure déposée par les Insoumis.J’ai appuyé ce samedi l’intervention de Nicolas Marchand rendue publique sur facebook et le blog de la section de Pierre-Bénite [1]Le texte de Nicolas Marchand. Je veux aujourd’hui pousser ma réflexion, car il y a urgence. Nous vivons un week-end tourmenté, demain les députés communistes devront donner leur position sur la motion de censure déposée par les Insoumis.

A nouveau, Mme Borne va utiliser le 49-3 pour faire passer en force le budget de la Sécurité sociale. Les députés de gauche sont vent debout à juste raison !

Un nouveau 49-3 et la Motion de censure de la seule France Insoumise

Les députés de la France Insoumise ont déposé leur propre motion de censure non suivis par les autres députés de gauche en désaccord sur la stratégie des Insoumis. Les “insoumis” voulaient imposer leur hégémonie, devant le refus de leurs partenaires, ils font cavalier seul, comme si c’était à prendre ou à laisser provoquant le crise de La Nupes. Faut-il en rester à cet accord électoral étriqué ou construire des rassemblements très larges des forces de gauche et écologistes avec les mouvements syndical, associatif et les citoyens ? Je le pense.

Élisabeth Borne à à l’Assemblée, répète sur tous les tons l’argument fallacieux que les oppositions ne souhaitent pas discuter de la loi, ce qui la contraint à user du 49.3 dont elle avait brandi la menace avant même la présentation du texte portant sur la Sécurité sociale. A la tribune de l’Assemblée, elle a osé prétexter que dans son “budget de la Sécurité sociale, nombre des mesures de ce projet de loi sont attendues par les Français ! » avant d’annoncer l’article 49.3 sur l’ensemble du texte, applaudie par les députés macronistes. Et elle a rajouté : «  je cite des mesures souhaitées, voulues, réclamées, parfois depuis longtemps, par la gauche de cette Assemblée ». Les députés de gauche ont quitté l’Hémicycle, dénonçant une « mascarade » de débats parlementaires.

La question de la motion de censure est une nouvelle fois posée. Cette fois-ci, les députés communistes, socialistes et écologistes ont décidé de ne pas en déposer.

Soyons clairs les communistes sont pour censurer le gouvernement qui agit autoritairement et bafoue une nouvelle fois la représentation nationale pour imposer ses projets par la force sans tenir compte des débats parlementaires et des amendements adoptés par une majorité de députés à l’assemblée.

Soutenir une motion de censure demande un texte très clair ayant du sens afin que la motion de censure ne puisse être ni banalisée ni instrumentalisée. Je ne suis pas satisfait du communiqué sur la motion de la France Insoumise et n’admets pas lors de la précédente motion de censure “Nupes” contre le 49.3 pour le Projet de loi de Finance 2023, son contenu flou critiquant qu’insuffisamment son orientation austéritaire et ne portant aucune alternative politique avec des propositions ouvrant une issues aux crises.

Quel contenu fort et clair d’une motion de censure sur le Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (PLFSS 2023).

Selon moi, la motion doit condamner avec vigueur la politique réactionnaire de Macron et montrer clairement qu’une alternative radicale existe qui de l’entreprise, la cité jusqu’à l’Assemblée est sans concession avec le capital, les profits, les marchés financiers, les banques et l’utilisation actuelle des richesses créées contre les salariés, les citoyens, nos services publics, le pays et ses collectivités.

L’augmentation du SMIC, des salaires, leur indexation sur l’inflation, l’éradication du chômage, le sens du travail à reconquérir, une protection sociale digne du 21ème siècle, des services publics élargis et développés notamment dans la santé et des pouvoirs nouveaux aux salariés et à leurs élus-es, sont les moteurs d’une nouvelle logique économique et sociale et d’une nouvelle efficacité dont ont besoin nos services publics, les entreprises et le pays.

En matière de santé, nous devons exiger que soit mis un terme à la casse de la Sécurité Sociale. Les propositions communistes visant à reconstruire un système de santé solide et efficace car répondant aux besoins de santé des Français portent une toute autre ambition que l’actuel PLFSS 2023. La pétition nationale : “des milliards pour l’hôpital et pas pour le capital!” signée par des dizaines de milliers de salariés et de citoyens, et portée par les professionnels de santé dans leurs luttes diverses depuis trois ans, le démontrent.

Nos propositions sont fortes. Le 100% Sécu, les centaines de milliers d’emplois dont l’hôpital public et les EHPAD ont besoin en urgence ce qui suppose dès maintenant de réaliser des milliers de pré-embauches avec l’engagement d’une embauche sous statut dès la formation acquise, de bloquer toutes les restructurations hospitalières en cours et les fermetures de lits programmées comme le transfert de l’hôpital Henry Gabrielle que la direction des Hospices Civils de Lyon veut imposer de force contre le voeu majoritaire du conseil métropolitain !

La protection sociale que nous voulons c’est aussi le retour de l’âge de la retraite à 60 ans avec comme garantie minimum de pension à 75% du dernier salaire après 40 ans de cotisations et prenant en compte les années d’études. C’est aussi une gestion démocratique de la Sécurité Sociale avec les organisations syndicales ayant les pouvoirs de la gérer sous le contrôle citoyen

Tout cela pose avec force la question du financement de la protection sociale. Il y a de ce point de vue urgence à innover et à sortir des sentiers battus d’autant que plusieurs dizaines de milliards d’euros par an seraient nécessaires, et probablement davantage selon les estimations syndicales. Il faut donc consacrer une part accrue des richesses à son financement, et cela ne sera possible qu’en changeant la façon de produire les richesses et en transformant radicalement la fiscalité pour qu’elle soit plus juste et mette à contribution le capital.

Est donc nécessaire, une autre gestion des entreprises, axée sur le développement de l’emploi et de la formation et non plus sur les profits pour les actionnaires et les financiers, permettant d’aller vers l’éradication du chômage en commençant par créer 5 millions de vrais emplois dans les entreprises et dans les services publics, et d’engendrer des gains d’efficacité économique gigantesques par l’accès de tous à des formations librement choisies et rémunérées au même niveau que les salaires.

Sur les 500 à 600 milliards de richesses supplémentaires créées chaque année, il serait alors possible d’en dégager assez pour financer une protection sociale digne du XXIe siècle.

Cela suppose évidemment d’élever le rapport des forces dans les entreprises pour arracher de nouveaux pouvoirs des salariés et de leurs représentants. Et de l’appuyer par de nouveaux moyens d’agir sur les entreprises : taxation de leurs revenus financiers pour les dissuader de placer leurs profits dans des opérations destructrices de capacités humaines, modulation des cotisations sociales patronales pour pénaliser les entreprises qui licencient, délocalisent ou précarisent, nouvelle sélectivité du crédit bancaire, suppression des exonérations de cotisations sociales par lesquelles les entreprises perçoivent des milliards d’€ sans condition en termes d’emploi, de formation et d’investissements écologiques.

La motion de censure dot être par ailleurs sans concession avec la politique libérale de la droite comme avec celle de l’extrême droite dont la conception de la société et de la politique est frontalement et radicalement opposée à celles pour laquelle nous agissons du local au national.

Voilà à mon avis le contenu fort sur le fond et offensif que devrait porter le texte de la motion de censure du 49-3 pour le PLFSS 2023. Le texte des députés insoumis ne porte pas un tel contenu. Il ne peut avoir notre assentiment.

Ethique politique et conception des valeurs de gauche

Les Insoumis ont décidé d’y aller seuls. Leur objectif avoué est de renverser le gouvernement et de provoquer une crise politique. Un objectif que partage le Rassemblement National qui pour cela est prêt à voter le texte des Insoumis qui seraient prêts à de telles alliances pour parvenir à leur fin. Cela m’interpelle sur leur éthique politique et sur leur conception des valeurs de gauche.

Comment pouvoir s’engager dans de telles alliances alors que le RN est un parti raciste, néolibéral , autoritaire, violent et fascisant ? Quelle crédibilité aura la lutte contre le racisme après de tels actes ? La situation politique actuelle bien que difficile, ne peut conduire à tout confondre, n’oublions pas que quand nous parlons de l’extrême droite, nous pensons aux populations immigrées ou d’origine immigrées directement concernés …  Il y a là une contradiction indéfendable.

C’est pourquoi, je considère que pour les communistes il n’est pas question de mélanger notre vote avec celui de l’extrême droite. Cela trahirait nos idéaux, notre projet politique et banaliserait ses idées nauséabondes très dangereuses pour la démocratie et le vivre ensemble.

Chez les députés insoumis, Eric Coquerel a précisé ne pas exclure un nouveau vote des députés RN de la motion de censure de la gauche. «Nous n’avons pas la majorité nécessaire : nous prenons tous ceux qui voudront rejoindre la motion de censure». Il confirme ainsi que pour les Insoumis des alliances contre nature sont souhaitables bien que non conformes aux valeurs de gauche que prétend défendre la « Nupes ». C’est indéfendable !

Les forces de gauche et écologistes ne sont pas favorables à une telle motion de censure.

Au Parti Socialiste, le député Delaporte explique « Nous pensons qu’il ne faut pas tomber dans le piège du gouvernement visant à banaliser l’usage du 49.3 ». « Redéposer une motion de censure en si peu de temps reviendrait à épuiser le récit politique, médiatique, mais également l’opinion publique. Cela reviendrait aussi à dévaluer l’outil qu’elle représente ».

Même refus chez la porte-parole du groupe EELV :  Même sous le mandat de Michel Rocard où il y a eu 28 activations du 49.3, la droite n’avait déposé que cinq motions de censure. Ce n’est donc pas systématique. Nous ne voulons pas banaliser la motion de censure comme le gouvernement banalise le 49.3.”

Pour les communistes, Fabien Roussel et André Chassaigne ont affirmé que jamais ils ne feraient le choix de mélanger les voix communistes avec celles de l’extrême droite, d’autant que depuis le début de la session parlementaires, les députés RN ont voté sans rechigner les textes du gouvernement Borne et ont voté contre la revalorisation du SMIC et des salaires conformément à leur orientation néolibérale.

Non à une motion de censure ouvrant la voie à l’Extrême droite

Sur quoi pourrait donc déboucher cette nouvelle motion de censure ? Pour son adoption, il faudrait le vote de la majorité absolue, soit 289 députés, pour contraindre le gouvernement Borne à démissionner. Pour se faire, l‘objectif des insoumis d’une alliance entre des députés de gauche, ceux de l’Extrême droite et ceux de la droite Les Républicains est possible. N‘est-ce pas irresponsable et très dangereux ?

A la tribune de l’Assemblée le député Corbières en se tournant vers la droite de l’Hémicycle a fait savoir que les Insoumis présenteront un texte “tribunitien” pouvant être signé par tout député y compris ceux de la droite Les Républicains et a rappelé que l’objectif des Insoumis était de faire tomber le gouvernement Borne afin d’obliger Macron à la dissolution et à convoquer de nouvelles législatives. Alexis Corbière affirme que face à une situation de crise politique qui voit le Président imposer ses projets à coups de 49-3, seul le peuple en se prononçant a le pouvoir de construire une nouvelle majorité politique.

Mais de quelle majorité politique parle t-il ? Nous devons y réfléchir à deux fois. En effet, les prospectives montrent que de nouvelles législatives pourraient voir deux gagnants : d’abord l’Extrême droite qui bénéficierait de sa banalisation, de la confusion politique créée et en partie du puissant rejet de Macron et ensuite Macron lui-même, qui par son autoritarisme répond au souhait de certains d’un pouvoir “fort” en capacité d’imposer “l’ordre” pour diriger le pays en l’absence de majorité et pour résister à la pression de la rue. Ce qu’Elizabeth Borne rode avec ses pratiques autoritaires.

La gauche peut-elle sortir gagnante de la crise politique créée ? Le rapport des forces politique électoral lui donne entre 25 % et 30% et les mobilisations sociales bien qu’importantes ne pèsent pas encore assez lourd pour imposer une autre logique avec des reculs significatifs arrachés à Macron. Il est indispensable si nous voulons gagner une majorité progressiste à l’Assemblée nationale, de travailler à faire monter les mobilisations pour des objectifs de progrès sociaux, les moyens et pouvoirs nécessaires pour les rendre pérennes.

C’est donc un risque politique énorme qui peut ouvrir la voie à l’extrême droite ! Cela serait un véritable coup de poignard dans le dos de notre peuple qui de plus serait fait en son nom conformément à la démarche populiste de Mélenchon qui a osé se féliciter du vote des députés du RN sur la 1ère motion de censure dont le texte au contenu pauvre ouvrait la porte aux opportunistes. 

Soyons sans illusion, Macron n’hésitera pas à s’acoquiner à la droite et l’extrême droite pour imposer ses projets réactionnaires. Pire, avec l’extrême droite il accélérera la mise en oeuvre de sa politique au service du capital, des multinationales, des super-riches et enfoncera le clou des divisions, en ciblant l’immigration, les privés d’emplois, les syndicalistes et s’en prendra à tous ceux qui résistent en usant de la répression sous toutes ses formes. C’est donc un pouvoir encore plus autoritaire qui serait à la tête du pays et qui pourrait pousser le changement de régime en cours qui voit un Président décider seul de tout, en toute circonstance !

Dans ces conditions nouvelles, en cette fin de semaine, une question est posée : comment les députés communistes voteront-ils ?

A écouter Fabien Roussel et André Chassaigne, je comprends que les députés communistes ne devraient pas voter le texte actuel des insoumis si l’extrême droite prenait la décision de le voter comme elle l’a fait lors de la 1ère motion de censure !

L’urgence : amplifier le mouvement social avec pour visée un rassemblement populaire majoritaire

Une autre question anime aussi l’Assemblée : que restera-t-il des heu­res passées à discuter de la loi de financement de la Sécu ? Le gouvernement aurait retenu seulement une centaine d’amendements mais ceux-ci seraient principalement issus de sa majorité et de lui-même, qui feraient monter le déficit de « 100 millions d’euros », selon le ministère de la Santé.

C’est cet acharnement à imposer de gré ou de force qu’il nous faut combattre avec ténacité en faisant vivre par le débat politique et dans les luttes nos propositions alternatives en cohérence avec notre volonté de redonner du sens au travail de chacune et de chacun et en visant l’émancipation humaine.

Cette question du « travail » mise en avant par Fabien Roussel à la Fête de l’Humanité et, plus précisément, de l’emploi et de la formation, est présente aujourd’hui dans les débats politiques, nous devons la nourrir par notre engagement militant, dans les entreprises, les cités jusqu’à l’Assemblée Nationale où avec les députés communistes nous pouvons faire valoir une autre perspective que la régression sociale que veulent imposer Macron et les néolibéraux quitte à faire alliance avec l’extrême droite.

Cette alternative radicale et crédible faisons la vivre en grand dans le cadre de la journée d’action syndicale du 10 novembre.

Pour l’évolution du rapport des forces politique, ces actes sont à mon avis certainement plus utile que le débat politicien initié par les Insoumis dont les résultats peuvent être encore plus catastrophiques que ceux actuels. Les députés communistes doivent aller de l’avant avec fermeté et sans compromis avec l’opportunisme et le “diable” qui veille aux erreurs de chacun pour sauter sur sa proie.

Quand ils ont nom Macron et Le Pen, prenons garde ! Et deux fois plutôt qu’une.

Jean CHAMBON Secrétaire de section de Pierre-Bénite du PCF Membre du CD de la Fédération du Rhône du PCF

Le 30 octobre 2022

Notes

Notes
1 Le texte de Nicolas Marchand

0 comments on “Jean Chambon : « Ne pas banaliser le 49.3 un coup de force pour imposer une austérité renforcée et destructrice ! »

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :