Contributions

Après les révélations de la lettre du RAPSE, nouveaux éléments de comparaisons entre les propositions du PCF et celles de LFI dans le domaine de l’énergie

Au regard de ces enjeux il est utile de mesurer aussi la faiblesse des propositions de FI sur la question de la démocratisation des entreprises, sur les pouvoirs des salariés et des populations sur l'orientation des entreprises et le crédit.

La crise économique doublée de la crise sanitaire pose en grand la question de son issue et en faveur de qui ?

C’est le contenu de la question présidentielle.

Aussi, débattre des contenus portés par les différents partis politiques est une façon saine de s’en emparer.

Mais sans édulcorer les obstacles et les divergences notamment entre les partis de gauche. Singulièrement concernant FI et le PCF car des voix s’élèvent pour dire que leurs propositions sont si proches qu’une candidature commune se justifie, avec l’effacement du PCF.

Nous avons vu avec la lettre du RAPSE n°166, disponible sur ce blog, réalisé par Gisèle Cailloux, que ce n’est pas exact.

Parce qu’ il s’agit de mener le débat à partir de la question : quelles sont les conditions à réunir pour sortir réellement de la crise avec un projet qui ouvre à de véritables transformations de la société et réponde aux besoins économiques sociaux et écologiques des êtres humains et de la planète, pour ne pas recommencer l’échec de la gauche face à la domination du capital.

Aussi, il est utile de continuer à décrypter les programmes, les propositions des uns et des autres afin de comprendre quels sont les sujets de débats, et donc le socle de la candidature communiste.

La lettre du RAPSE portait sur la Sécurité d’emploi et de formation, les financements et les pouvoirs des salariés dans l’entreprise.

Un autre sujet particulièrement important dans notre société est en débat : la question de l’énergie

Pour le PCF la réponse conjointe aux objectifs sociaux et à l’impératif écologique est de :

permettre à tous les citoyens de disposer d’une électricité accessible, bon marché, sans sélection par l’argent, tout en combattant efficacement le réchauffement climatique avec des modes de production produisant le moins possible de gaz à effet de serre et si possible totalement décarbonés.

Cela signifie faire de l’accès à l’énergie un bien commun ( comme le rappelait Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, à l’occasion des états généraux de l’Energie)

Pour cela, une reconquête d’une indépendance énergétique est nécessaire mais avec une nouvelle coopération européenne et internationale.

Le moyen technique d’y parvenir est de disposer d’un parc de production électrique apte à répondre aux attentes d’une société où l’électricité prend une place prépondérante et où aucune coupure n’est plus supportable, parce que toutes les composantes de la vie quotidienne sont aujourd’hui dépendantes de l’électricité.

C’est le choix qu’ont fait les communistes au 38e congrès du PCF, en se prononçant pour

« un plan pour développer un nouveau mix énergétique remplaçant les énergies carbonées facteur de réchauffement climatique et associant développement des énergies renouvelables avec la maîtrise publique, sociale et démocratique, d’une filière nucléaire sécurisée et renouvelée ; s’inscrivant dans une transition énergétique, écologique et non malthusienne, ce plan nécessiterait un grand effort de recherche, d’embauches, de formation, d’investissement et d’innovation sociale ; il serait élaboré avec tous les acteurs sociaux et citoyens ».

Le pouvoir prétend, aujourd’hui, mettre en place une « stratégie nationale bas carbone » pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 sans développer la production d’électricité à la hauteur des besoins, ce qui implique un ajustement de la demande à la production et une réduction des usages au nom de la « sobriété énergétique ».

Le PCF conteste cette notion et en dénonce son caractère dangereux, car elle préconise de n’exercer aucune maîtrise sur le « capital » et de ses responsabilités de réponses aux besoins, en ajustant à la baisse la satisfaction de ceux-ci pour l’aligner sur l’insuffisance des productions.

C’est ce à quoi conduirait la mise en application de la loi LTECV et de la PPE (voir à ce sujet le cahier d’acteur du PCF) mais cette loi est l’oeuvre du PS et de tous ceux avec qui certains veulent faire alliance en se référant aux thèses de négaWatt, ce que JLM a encore rappelé sur France Inter le 15 mars pour expliquer qu’on pouvait se passer du nucléaire (dès 2030).

NégaWatt est à la tête de la promotion de cette notion de sobriété depuis près de 20 ans (pour justifier qu’on peut quantitativement se passer du nucléaire) ce qui conduirait immanquablement, au-delà d’un effondrement économique, à une austérité renforcée particulièrement dramatique pour les plus pauvres et inévitablement à des contraintes pour le plus grand nombre, voire à des mesures répressives.

Les centrales électriques pilotables resteront incontournables, car ce sont celles qui produisent à la demande, indépendamment de la situation météorologique, pour s’assurer qu’à chaque instant la production est parfaitement égale à la consommation à l’échelle du pays.

Cela exclut de fait un mix électrique 100 % renouvelable constitué majoritairement d’énergies intermittentes (éolien et solaire).

En toute hypothèse, les besoins vont continuer de croître. Les travaux associant recherche appliquée, recherche fondamentale, nécessairement libre et dont les résultats ne peuvent être définis par avance, exigent des moyens et des coopérations internationales (projet ITER sur la fusion nucléaire) incompatibles avec les orientations actuelles qui sacrifient les techniques les plus innovantes (abandon par le gouvernement Macron du projet ASTRID sur les surrégénérateurs) au profit d’investissements assujettis à une exigence de retour rapide sur investissements qui n’est réalisé que du fait des subventions et prix garantis exorbitants dont bénéficient ces investissements au détrimant d’EDF et des consommateurs.

Comme en matière d’emplois, l’obstacle principal ici aussi est: la domination du capital, son accumulation au rythme dicté par la recherche du taux de profit le plus élevé possible.

L’outil performant de réponse aux besoins d’électricité, mis en place à la Libération sous l’impulsion de Marcel Paul, a été gravement mis à mal au début du XXIe siècle :

– par l’introduction dans la gestion d’EDF d’une gestion inspirée par la rentabilité capitaliste,

– par la déréglementation et la création artificielle de rentes au profit de producteurs privés, tout cela au nom d’une prétendue « concurrence réelle et équitable au bénéfice des consommateurs ».

Les politiques dictées par la rentabilisation du capital se sont également attaquées à l’ensemble de la filière industrielle qui concourt à la fabrication des équipements nécessaires à la production et à la gestion de l’électricité : il s’agit d’une filière qui occupe 250 000 emplois dans de grands groupes multinationaux mais aussi dans une multitude de PME-TPE sous-traitantes. L’organisation de la production en chaînes d’activités et de valeur mondiales a déstructuré l’ensemble du système, mis en péril la maîtrise technologique en France et en Europe et rendu le travail malade. Or il n’y a pas d’avenir énergétique sans une industrie ! il faut donc une mobilisation des salariés de la filière et de l’ensemble de la population. La gestion capitaliste de la filière amont a démantelé l’outil industriel construit dans les années 1950 à 1970 et structuré par la commande publique, outil qui s’est encore développé dans la décennie 90 (des centrales ont été pour leur part démarrées jusqu’au début des années 2000).. Les étapes successives vont de l’abandon de Jeumont-Schneider à la destruction par GE des activités européennes dont il avait pris le contrôle sous les pressions du gouvernement américain et avec la complicité d’Emmanuel Macron.

C’est la mise en cause radicale des logiques capitalistes qui distingue les propositions communistes des autres propositions se réclamant de la gauche ou de l’écologie, et qui rend indispensable, pour réussir un rassemblement à gauche, leur expression dans le débat politique.

C’est pourquoi nous proposons une articulation forte entre la question de la production énergétique nécessaire et écologique et une programmation d’un développement industriel dans des filières stratégiques comme l’énergie et tout ce qui y concoure, avec la création de milliers d’emplois nécessaires dans tous les secteurs, et le développement statutaire pour les salariés.

Que dit le programme FI sur ces questions ?

De même pour la filière bois, il est remarquable que la gestion des forêts devient un sujet important avec des luttes qui se développent contre les coupes rases. FI s’en revendique. Mais là aussi, la question est de voir comment la domination du capital se développe dans ce domaine, pour s’y opposer et promouvoir un autre modèle qui transforme radicalement la situation en répondant aux enjeux écologiques et sociaux.

  1. Voici quelques éléments des propositions de FI
  2. La bifurcation écologique, enjeu central

C’est autour et à partir de l’urgence écologique et climatique que doit se penser la politique de la Nation. La préoccupation écologique doit être inscrite au sommet de la hiérarchie des normes et conditionner l’action de l’État. L’enjeu est la reconquête collective du temps long. C’est le but de la planification écologique : prendre les mesures nécessaires pour faire bifurquer notre modèle de production, de consommation et d’échanges.

Mesure clé : Inscrire dans la Constitution la règle verte instaurant l’obligation de ne pas prélever ni produire davantage que ce que notre planète peut régénérer ou absorber

  1. Énergie : 100% d’énergies renouvelables en 2050

Les énergies fossiles sont polluantes. Le nucléaire n’est pas non plus une solution d’avenir. Il ne règle aucune question : ni l’indépendance d’approvisionnement, ni la résilience des installations face aux bouleversements climatiques, ni la gestion des déchets. Il faut donc sortir des deux à la fois.

Mesure clé : Planifier le 100% énergies renouvelables avec un double axe sobriété/efficacité énergétique

Pour y parvenir :

  • Sortir des énergies carbonées : arrêter les subventions aux énergies fossiles, y compris à l’étranger
  • Sortir du nucléaire : abandonner les projets d’EPR et d’enfouissement des déchets nucléaires, planifier le démantèlement de la centrale de Fessenheim
  • Revenir sur la libéralisation du marché de l’électricité et du gaz : stopper la privatisation des barrages hydroélectriques, créer un pôle public de l’énergie en renationalisant EDF et Engie et en lien avec des coopératives locales
  1. La sortie du nucléaire et la promotion des énergies renouvelables, campagne et bataille parlementaire de la France insoumise 

Non seulement, le choix de sortir du nucléaire est affirmé sans tenir compte des besoins en électricité, tels qu’ils se présentent, mais surtout on remarque que ce programme s’inscrit dans la même logique que celle du pouvoir et des marchés financiers.

De fait, il va même au-delà de ce que ces derniers prévoient de faire, le programme de LFI exonèrerait bel et bien le capital de ses responsabilités dans ces domaines

D’une part, aucune prise en compte de ce qu’expriment les salariés de l’ensemble du secteur (jusqu’ aux chercheurs), d’autre part, aucune mise en cause de la domination du capital y compris sur les financements et le développement de la filière industrielle énergétique, et la démocratisation par des pouvoirs aux salariés et aux populations sur l’emploi et les financements.

Il y a donc bien des contenus très différents portés par le PCF et la FI. Le danger serait de passer sous silence ces questions.

  • La fillière bois

( ce qui est immédiatement possible dans le cadre des traités ). Ainsi le fonds européen et la BCE sont les outils utiles pour ne pas emprunter sur les marchés financiers et pour financer des projets liés à la transition écologique et au développement des services publics.

La forêt devient un secteur d’investissement qu’occupent de plus en plus toutes les banques et assurances en cherchant là aussi la rentabilité financière.

De fait, le critère qui devient dominant est le rapport financier que peut produire la forêt. L’implantation du pin Douglas et les coupes rases qui en découlent dans le Morvan, par exemple, est un écho à cette exigence.

Dans ce domaine aussi, il faut s’attaquer à la domination du capital.

D’où la pertinence des propositions du PCF sur la prise du pouvoir sur l’argent et la démocratisation profonde de la société, à l’entreprise, dans les banques et dans toutes les sphères décisionnelles concernant le crédit, ses critères, l’attribution des fonds publics etc….. pour les forêts et la filière bois aussi. Ainsi le développement de l’action de l’ONF (dont l’embauche d’agents ) nécessite de dire aussi comment financer le développement des services publics. Ce que ne fait pas la FI.

Le PCF propose la création d’un fonds européen pour financer les services publics

La 6eme République

Sans aborder l’ensemble des points, il est utile de mesurer la faiblesse des propositions de FI sur la question de la démocratisation des entreprises, sur les pouvoirs des salariés et des populations sur les entreprises et le crédit.

Les propositions du programme FI se centrent sur la mise en place d’un plan de « séparation de l’argent et de l’Etat », par des mesures allant de la suppression du monopole du déclenchement des poursuites judiciaires, l’interdiction du pantouflage, la lutte contre l’influence des lobbys, etc…

Le programme porte aussi des propositions sur l’intervention populaire, centrées sur le pouvoir de révoquer les élus, ou de faire des propositions de loi avec la reprise du RIC ( gilets jaunes ). Il porte aussi des propositions sur les droits des salariés dans les entreprises, avec l’ambition de donner une citoyenneté aux salariés dans les entreprises.

Mais le défaut majeur là encore est de proposer le développement des coopératives, de fait en occultant la question du fonctionnement de l’essentiel des entreprises, des grands groupes et du poids du capital sur l’ensemble de la société.

Tel que, ce programme liste une série de mesures s’attaquant plutôt à la périphérie de l’entreprise. Rien sur les banques, ni le crédit ni les critères d’attribution du crédit…. Or il s’agit du cœur du réacteur de la domination du capital.

Les propositions du PCF cherchent à répondre à cela. C’est tout le sens de la cohérence des propositions des pouvoirs aux salariés pour suspendre les plans de licenciements, des pouvoirs pour formuler et imposer le débat sur des solutions alternatives à celles des actionnaires, de pouvoir peser sur les financements des propositions formulées, et des conférences pour l’emploi, nationale, régionales et locales, pour permettre le débat public et l’intervention des salariés et des populations sur les entreprises, leur fonctionnement, leurs objectifs etc….

Les propositions de nouvelles institutions comme les conférences pour l’emploi du PCF et des pouvoirs véritables aux salariés s’inscrivent dans une 6ème république, outil de combat contre la domination du capital qui pollue la planète. Ces propositions visent à armer les salariés et les populations pour intervenir, et non rester dans une démarche délégataire.

La candidature du PCF aux présidentielles doit porter tous ses sujets en donnant la cohérence forte de ses propositions. Cela est utile pour le monde du travail et les populations, à la jeunesse pour se rassembler sur des objectifs de changements radicaux pour réussir une politique de gauche. En débattre ce n’est pas diviser mais au contraire, chercher à construire un rassemblement lucide parmi les salariés et qui fasse progresser la gauche sur des bases de transformations sociales. C’est aussi le meilleur chemin pour faire barrage au FN.

0 comments on “Après les révélations de la lettre du RAPSE, nouveaux éléments de comparaisons entre les propositions du PCF et celles de LFI dans le domaine de l’énergie

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :