Extraits d’un article de Yves Dimicoli choisi par Jean Louis et Gisèle Cailloux
Interrogez un homme politique de droite ou de la gauche sociale démocrate, un écologiste ou un journaliste sur le situation économique. Après quelques phrases il vous répondra sur le ton de Molière “La Chine monsieur, la Chine !”. Ce sera encore plus vrai si vous interrogez Trump, un général , un dirigeant de l’OTAN toujours à la recherche d’un ennemi, ” la Chine vous dis je” .
Pourtant ce sont les patrons français, entre autres, qui ont été investir là-bas pour produire moins cher et ré-importer ici.
La Chine pendant ce temps là, même si tout n’y est pas rose, vient d’aller chercher des morceaux de lune, d’ouvrir le soleil sur terre pour une énergie nouvelle, créé de nouvelles universités. Elle lance l’avion régional chinois Comac ARJ21, Elle se dote à partir du 1er janvier 2021, de son premier Code civil. Malgré l’épidemie, son économie est en croissance et elle offre ses vaccins anticovids comme un bien universel.
Alors que les tenants du capitalisme veulent en faire un ennemi et l’isoler, celle-ci ne reste pas les deux pieds dans le même sabot.
Elle vient de conclure un partenariat régional économique global baptisé RCEP, qui devient l’accord commercial le plus important du monde. Ses membres réalisent 30% du produit intérieur brut (PIB) mondial. De plus, il concernera plus de 2 milliards d’habitants. (Elle travaille aussi à un accord commerciale avec l’Europe).
Yves Dimicoli vient d’écrire un texte important d’analyse sur l’origine et les conséquences de cet accord pour la revue économie et politique.
Avec son accord j’en livre ici un résumé.
(RCEP) INTEGRATION COMMERCIALE EN ASIE : DEFI OU OPPORTUNITE ?
Quinze pays d’Asie ont signé, le 15 novembre 2020 à Hanoï (Viet Nam), une méga-entente commerciale, promue par les pays de l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du sud-est) et la Chine.
Cette nouvelle architecture a été édifiée sans l’Inde, qui s’en est finalement séparée. Elle émerge sans les États-Unis mis, pour l’heure, hors-jeu par Trump. Le RCPE, va amorcer une nouvelle phase d’intégration commerciale de la zone, renforcer son attractivité et y consolider la centralité de la Chine marquant l’échec de la stratégie trumpienne de « découplage » des États-Unis
I – Contexte conjoncturel du sud-est asiatique : résilience face aux crises
Actuellement le fait le plus marquant tient dans la résilience de la Chine, seule économie au monde, selon le FMI, à afficher une croissance positive de son PIB (+1,9%) en 2020, alors que la planète connaîtrait une forte récession (-4,4%). Son redressement, après une maîtrise remarquée de la pandémie Covid-19, s’est encore renforcé en octobre dernier La production industrielle a maintenu son taux de croissance à 6,9% en glissement annuel en septembre et octobre (+7,4 % dans les services). Cela a marché de pair avec le regain de la consommation des ménages et l’amélioration de l’emploi (le taux de chômage urbain a continué de diminuer en octobre pour atteindre 5,3%).
La région Asie-Pacifique a été l’un des principaux bénéficiaires de la libéralisation du commerce et des investissements internationaux au cours des cinq décennies écoulées.De nombreux pays ont connu une croissance rapide à long terme de leurs exportions vers les principaux marchés solvables du monde, en liaison avec la fragmentation mondiale des chaînes d’activité et de valeur des multinationales.
Cependant, cette tendance s’est heurtée à la guerre commerciale des États-Unis contre la Chine en 2018 et 2019 avec des effets sur toute la chaîne d’approvisionnement de nombreux pays asiatiques.
Ces perturbations se sont beaucoup intensifiées au cours du premier semestre 2020 avec le choc de la pandémie Covid-19. Mais, à partir de juin, avec le relâchement des restrictions, le rebond mécanique temporaire des économies européennes et nord-américaines a suscité un nette poussée des exportations manufacturières pour de nombreuses économies d’Asie-Pacifique, particulièrement dans les secteurs de l’automobile, de la pharmacie et de l’électronique. Les échanges de services sont cependant restés faibles dans toute la région du fait de l’arrêt des voyages touristiques internationaux.
Le RCEP prend donc forme à un moment d’exacerbation des antagonismes de la crise systémique du capitalisme. Le protectionnisme a marqué des points et le multilatéralisme a reculé, tandis qu’au plan géopolitique, les relations demeurent extrêmement tendues à la veille de l’installation de J. Biden à la Maison Blanche. Les pays qui ont pris l’initiative de cet accord massif de libre échange présentent une conjoncture économique et sanitaire moins dégradée qu’en Asie du sud, aux États-Unis ou en Europe, alors que la pandémie a été maîtrisée plus systématiquement chez eux qu’ailleurs.
II – Renforcement des chaînes d’activité et de valeur régionales asiatiques :
Le RCEP s’appuie sur de précédents accords de libre-échange, fruit d’une intense activité diplomatique de l’ASEAN.
Il constitue le plus grand bloc commercial au monde, couvrant 30% du total mondial de la population (2,2 milliards d’êtres humains) soit 4,5 fois plus que le CPTPP et 5 fois plus que l’Union européenne. Son PIB représente une proportion analogue du PIB mondial.
Le RCEP concerne, à des degrés divers, les échanges de produits, ceux de services, l’e-commerce, la coopération économique. Il effleure aussi de nouveaux domaines comme la propriété intellectuelle ou les procédures phytosanitaires.
Dans une résolution conjointe finale, les dirigeants des pays signataires ont déclaré que cet accord « démontre notre ferme engagement à soutenir la reprise économique, le développement inclusif, la création d’emplois et le renforcement des chaînes d’approvisionnement régionales, ainsi que notre soutien à un accord de commerce et d’investissement ouvert, inclusif et fondé sur des règles.
A la différence des autres grands accords de libre-échange, comme celui de l’Union européenne où le CPTPP, le RCEP a exigé moins de concessions politiques initiales, il laisse pour l’avenir plus de place aux négociations et rapports de force politiques intrarégionaux, à leur conditionnement possible par les luttes populaires.
Et surtout, le RCEP ne comporte pas de mécanisme de règlement des différends entre investisseurs étrangers et Etat permettant aux entreprises d’attaquer un État national devant un tribunal arbitral international dont le plus important (CIRDI), basé à Washington, dépend de la Banque mondiale.
La disposition la plus significative concerne l’établissement de règles d’origines communes conditionnant les tarifs douniers, les marchandises éligibles.
Dans le cadre de l’ ASEAN, un produit fabriqué en Indonésie contenant des composants australiens, par exemple, pourrait être soumis à des droits de douane dans d’autres pays membres. Dans le cadre du RCEP, les pièces provenant de n’importe quel pays membre de l’accord feraient l’objet du même traitement.
Cela devrait inciter les entreprises localisées au sein du RCEP à y rechercher des fournisseurs, ce qui peut constituer un motif fort de localisation et de densification des chaînes d’approvisionnement et d’activité dans cette zone sans imposer d’engagements contraignants sur les normes sanitaires et de travail,. Cela devrait contribuer à accroître son attractivité, développer ses interdépendances et diminuer son asservissement de captage de la valeur ajoutée des grandes multinationales occidentales.
Certes, le RCEP, en l’état, ne va pas susciter de puissants bouleversements de l’ordre commercial mondial.
Cela tient, notamment, au fait que les économies membres du RCEP, ayant déjà conclu des accords bilatéraux de libre-échange, sont de niveaux de développement hétérogènes.
Mais en tant que bloc commercial et d’investissement il est extrêmement important pour le reste du monde : environ 70% des entrées d’investissements directs étrangers dans le RCEP proviennent d’économies qui lui sont extérieures et il est également une source majeure d’investissements directs étrangers dans le reste du monde.
Il boosterait les exportations des pays membres de façon telle qu’elles augmenteraient de plus de 10% d’ici 2025.
Mais quid de l’emploi et de la montée en qualification des populations impliquées ? Quid de l’expansion des services publics pour la santé, l’éducation, la recherche, le logement, la vieillesse ?…
On connaît bien ce type de raisonnement concernant la nécessité de contenir les dépenses humaines, il a fait les riches heures, multiples rapports et modèles économétriques à l’appui, de la promotion du marché unique européen, jusqu’à la signature de l’Acte unique en 1992.
On mesure ici le rôle phare qui incombera à la Chine , pour le pire ou le meilleur, face à un occident qui lui demeure hostile jusqu’à l’intérieur du RCEP, avec le Japon ou l’Australie si affidés à Washington. Mais il y a aussi des partenaires asiatiques, comme le Viet Nam,qui crait l’hégémonie du grand voisin Chinois . Et on est obligé d’avoir en tête aussi, à la frontière du RCEP, le caractère toujours très heurté des rapports avec l’immense Inde et ses dirigeants hypernationalistes.
C’est dire l’importance que revêtiront les luttes sociales nationales dans tous ces pays pour des progrès sociaux, écologiques, sociétaux et pour la paix.
III – La Chine locomotive du RCEP :
Alors que peuvent être les perspectives de ce nouvel accord de libre-échange ?
Tous les observateurs s’accordent pour dire qu’il s’agit d’un succès pour la Chine, régional et mondial.
Le RCEP devrait se conjuguer avec l’initiative dite des « nouvelles Routes de la soie » et l’accélérer, alors que le pays a adopté un modèle de développement dit « à double circulation » « Le développement du marché intérieur est la clé pour forger une nouvelle voie, tandis que la poursuite de l’ouverture [sur l’extérieur] est nécessaire pour s’engager sur les marchés internationaux. »(chen Zhimin vice président de l’Université de Fudan)
Le RCEP supprimerait les restrictions potentielles sur l’approvisionnement de la Chine en produits en la plaçant dans la même catégorie que les autres membres de l’accord. Cela entretiendra l’ambivalence de son statut commercial sur la scène mondiale.
En effet, en devenant membre de l’OMC en 2001, la Chine avait demandé à pouvoir bénéficier, comme les autres membres, du statut de pays à « économie de marché ». Il lui a été donné quinze ans pour effectuer les réformes requises par les puissances dominant l’OMC pour lesquelles une économie de ce type ne peut être que capitaliste et, donc, régulée par le taux de profit via les prix de marché.
Or la Chine se dit et entend rester « économie socialiste de marché ». Au bout de quinze ans, les grandes puissances capitalistes, l’Union européenne en tête, ont estimé que ces réformes n’étaient pas suffisantes. La Chine a donc déposé plainte contre l’UE devant l’OMC. Pourtant, à la date butoir du 15 juin dernier, elle a refusé de relancer cette plainte, accréditant l’idée qu’elle se résignait à ne pas accéder au statut convoité, au risque d’avoir à supporter de lourdes taxes anti-dumping.
- Cet événement n’a pas donné lieu à un communiqué très triomphal de Bruxelles, le quotidien économique Les Échos qualifiant même cette victoire de « discrète ». Et pour cause, la Chine demeure membre de l’OMC et elle « n’acceptera jamais d’être privée de son droit à un traitement spécial et différencié en tant que membre en développement ». Elle représente un pôle d’attractivité parmi les plus puissants au monde avec son immense marché intérieur et sa volonté d’avancer dans la révolution informationnelle, la révolution écologique, la promotion du yuan, la transformation du multilatéralisme et l’avancée vers une monnaie commune mondiale.
La Chine a concédé à l’Union européenne – dont l’État britannique, ennemi juré, ne fait plus partie – une victoire temporaire et à peu de frais . C’est un signal positif envoyé aux dirigeants européens, considérant encore la Chine, non pas tant comme un partenaire-concurrent partageant avec l’Europe le besoin vital de s’émanciper de la domination nord-américaine et du dollar, mais, surtout, comme un « rival systémique ». Et nombreux sont ceux d’entre eux qui souhaitent qu’avec J. Biden s’affirme à nouveau le « leadership américain ».
Le RCEP crée des conditions nouvelles pour accélérer des négociations enlisées concernant, notamment, un projet d’accord de libre-échange Chine-Corée-Japon et celui d’un traité bilatéral Chine-Union européenne.
La Chine va ainsi se confirmer comme le premier centre manufacturier mondial et pourrait susciter l’érection de hubs industriels complémentaires dans d’autres pays de la région.
En effet, son développement spectaculaire depuis les années 1980, mais s’essoufflant avec des tensions financières, a suscité, avec la hausse du coût salarial de l’emploi, des délocalisations vers des pays voisins au « coût du travail » plus faible, tandis que son propre marché intérieur demeure insuffisamment développé au regard du formidable potentiel démographique du pays.
Pékin est donc face à la nécessité absolue de monter en gamme ses productions et de se doter d’une offre conséquente de services informationnels en s’appuyant sur des réseaux de fournisseurs et de sous-traitants efficaces dans la région et partageant les mêmes normes commerciales de base, en vue d’évolutions ultérieures. Le RCEP en ouvre l’opportunité, d’autant plus que la pandémie Covid-19 semble avoir eu pour effet d ‘ accélérer la digitalisation des grandes entreprises chinoises et de les pousser à raccourcir leurs chaînes d’approvisionnement.
Cela se conjugue avec la volonté affichée par Pékin de faire reposer de plus en plus sa croissance, non sur les seules exportations en servant d’« atelier industriel » du monde, mais en impulsant l’expansion de sa propre demande intérieure.
Mais tout cela suppose aussi que la Chine ne se contente pas d’être un grand donneur d’ordre vis-à-vis de sous-traitants localisés dans des pays à coûts salariaux plus faibles. L’impératif de codéveloppement sera puissant pour éviter une forte relance de la suraccumulation de capital mondiale.
Car, avec les technologies informationnelles, notamment l’intelligence artificielle chère aux dirigeants chinois, les économies de moyens matériels et humains sont telles qu’elles peuvent engendrer beaucoup de chômage, si les investissements projetés ne sont pas assortis d’objectifs ambitieux contrôlables de créations d’emploi de qualité et de formation tout au long de la vie pour soutenir ensemble la demande et l’efficacité sociale de l’offre.
On mesure donc, aussi, la nécessité d’une puissante expansion de tous les services publics dans la région, comme vient de le confirmer la pandémie Covid-19 pour la santé et comme y appellent les impératifs de progrès massifs et continus des niveaux de développement socio-culturel des populations ou ceux relatifs à l’environnement et au développement urbain.
Ces enjeux pourraient, au gré des luttes sociales et sociétales, des joutes politico-diplomatiques, voire des conflits, provoquer progressivement d’importants changements institutionnels vers l’essor de nouveaux critères de gestion et systèmes de pouvoir mixtes originaux, au lieu de la main de fer étatiste ou du déclin démocratique face à la dictature des marchés.
Partenaires-concurrents ou « rivaux systémiques » ?
Il faut prendre la mesure de la novation très ambivalente que constitue la participation effective à un même accord de libre-échange de la Chine, du Japon et de la Corée du sud. Pékin est même à la recherche d’un accord trilatéral spécifique.
Il faut prendre aussi la mesure de ce que, désormais, deux grands ensembles commerciaux régionaux vont se chevaucher en Asie-Pacifique: le RCEP et le CPTPP. A leur intersection on trouve huit pays qui vont être confrontés à un besoin de complémentarités souples plutôt que de rivalités explosives : l’Australie, le Brunei, le Japon, la Malaisie, la Nouvelle Zélande, Singapour et le Viet Nam. Pour certains d’entre eux, ils essaieront aussi de jouer le rôle de cheval de Troie pour le compte des États-Unis dont ils sont des alliés proches. Bref, la contradiction systémique n’est plus à côté d’eux mais va passer par eux. En développeront-ils les dimensions antagoniques ou feront-ils mouvement vers de nouveaux compromis ?
On peut penser que le miel promis par le RCEP retiendra durablement les mouches.
Le Japon, par exemple, est, sans conteste, le deuxième grand gagnant de l’accord. Cette zone capte 46% de ses exportations, la Chine et la Corée du sud étant ses deux premiers partenaires commerciaux. Dans le cadre du RCEP, près de 90% des pièces automobiles expédiées en Chine (27 % du commerce bilatéral) devraient être exonérés de droits d’importation.
Avec la Corée du sudjusqu’à 92% des exportations japonaises vers celle-ci qui seront exemptés de droits de douane, contre 19% actuellement.
C’est dire si le Japon ne peut se désintéresser de l’avenir du RCEP.
Et l’Australie ? Ses relations avec la Chine ont commencé de se détériorer en 2018, quand, à l’instigation de Washington dont il est un partenaire indéfectible, Canberra a exclu le géant chinois de télécoms Huawei de la construction de son réseau 5G, au nom prétendu de la sécurité nationale.
Aussitot le géant minier australien BHP apprenait, mi-octobre, que des clients chinois avaient demandé des reports de commandes de charbon.
La pression est forte pour l’Australie. Elle exporte pour 66 milliards de dollars, de charbon, pour 40 milliards u bitumineux avec la Chine et elle possède 300 mines de divers minéraux dont les exportations lui rapportent 248 milliards de dollars chaque année. Forte consommatrice de matières premières, la Chine importe à 85% du d’Australie et du Brésil le minerai de fer dont elle a besoin. Mais la Chine peut diversifier ses sources. Tout cela sans compter que le Président chinois Xi Jinping a annoncé, en Assemblée générale des Nations-Unies en septembre dernier, sa décision d’atteindre la neutralité carbone en 2060.
Quant à l’Inde, en conflit sourd avec la Chine et très travaillée par Washington, pourra-t-elle se tenir longtemps éloignée de cet accord dont les membres lui tiennent toujours les portes ouvertes ?
.Des enjeux historiques à saisir
Pour la première fois, les États-Unis sont politiquement hors du coup même si Wall Street et le dollar polarisent encore une grande partie des flux financiers et des « cerveaux » asiatiques. De plus, J. Biden a affirmé vouloir faire revenir son pays dans le CPTPP, mais si cela se fait ce sera dans une position moins décisive qu’entre 2008 et 2016.
Aux efforts aventuristes de Trump, la riposte a porté sur la recherche d’un progrès des interdépendances économiques régionales, plutôt que sur le repliement et la bravade militaire, sans dédaigner toutefois montrer les muscles en ce domaine comme sur Taïwan ou, plus inquiétant, en mer de Chine orientale. Pékin a saisi l’étendard du multilatéralisme piétiné par la Maison blanche sous le regard désespéré et impuissant des européens. Simultanément, il a obtenu, avec la Corée du sud, Singapour et le Viet Nam notamment, une victoire d’étape significative en matière sanitaire , la pandémie Covid-19 a été endiguée quand les États-Unis et l’Europe s’y enlisaient.
Précisément, que va faire cette dernière ?
Josep Borell, Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité se félicite « de l’intégration économique multilatérale fondée sur des règles » dont procède le RCPE et insiste sur le fait que « la région indopacifique revêt pour nous une importance stratégique » Surtout, il relève : « Un avantage majeur (du RCEP) sera l’harmonisation des règles d’origine qui aidera également les entreprises européennes de la région, permettant aux entreprises d’expédier plus facilement des produits dans la région sans rencontrer des critères de règle d’origine différents pour chaque étape du processus de fabrication ».
Le président de l’Association allemande du commerce extérieur (BGA), Anton Börner, a déclaré, lui, que « lorsque l’accès au marché s’améliorera entre les entreprises chinoises et les 14 autres pays, les possibilités pour les entreprises allemandes d’exporter des marchandises pourraient être réduites ».
Il serait illusoire de penser, en effet, que les groupes européens ne se laisseront pas attirer eux aussi vers cette region. Les risques de nouvelles délocalisations ne sont pas négligeables.
L’enjeu fondamental n’est-il pas que les investissements programmés s’accompagnent d’un niveau réciproque du nombre et de la qualité des emplois créés, des formations dispensées, des salaires versés, du partage des recherches, de l’essor de co-productions mutuellement avantageuses, de la mobilisation de co-financements socialement efficaces ? Cela exigerait de recourir à de nouveaux critères d’efficacité sociale, au lieu de la rentabilité financière ou des diktats étatistes, dans une concertation permanente avec les salariés, populations et élus sur les territoires concernés.
Le nouveau président des Etats-Unis va tenter de réparer les dégâts causés au « lien atlantique » par son prédécesseur, sa ligne restera celle de l’ « America first », avec une hostilité à la Chine, plus courtoise que celle de Trump, mais toujours très forte.
Or, Il n’y aura pas d’issue à la crise systémique sans transformation très profonde des liens entre l’Occident et l’Orient, sans nouveaux rapports à la Chine. De nouvelles convulsions mondiales s’annoncent avec les limites atteintes par l’insuffisance criante de la demande mondiale et des qualifications, la domination des capitaux financiers et de l’appareil militaire américains, l’hégémonie du dollar. Dans cette situation, l’Europe si affaiblie et si asservie aux Etats-Unis devrait, pour se redresser et s’affirmer, promouvoir son modèle social au lieu de le démembrer, faire reculer la dictature des marchés financiers, utiliser l’euro à ces fins avec une réorientation de la BCE, ne pas se replier sur elle-même et renouveler la démocratie, contribuer à promouvoir un nouveau multilatéralisme et une monnaie commune mondiale de coopération. Pour tout cela, elle peut chercher à se rapprocher, dans le respect des différences, de la Chine et des BRICS vers de nouveaux types de partenariat mutuellement avantageux pour toutes les populations concernées.
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